dimanche 1 février 2015

AVENIR DE LA PROFESSION MEDICALE:

Encore les médecins!

Gaetan Barrette, sante
Photo d'Archives
Une autre semaine sous le signe des chicaneries entre l’ineffable Gaétan Barrette, ministre de la santé et ses collègues et désormais ennemis, les médecins spécialistes et les omnipraticiens.
Je ne dois pas être la seule à être irritée par les doléances et les arguments mous des pleureuses qui représentent les deux fédérations, les docteurs Diane Francoeur et Louis Godin. De même que par les pubs de propagande fort coûteuses des médecins spécialistes. Cela apparaît un peu indécent dans le contexte, non? Bien sûr que les manières intempestives et cavalières du ministre froissent ces messieurs dames habitués à plus de componction. Et qu’elles ne sont pas souhaitables dans un environnement civilisé. Mais nous n’en sommes plus là. Le Ministère de la Santé et des Services sociaux est un immense paquebot qui dérive depuis de nombreuses années et il était grand temps de lui faire changer de cap. Cela ne peut arriver sans heurt. Et il faut avoir le front du Dr. Barrette pour oser pareille manœuvre. Même si certains questionnent ses raisons de le faire.
Le salaire des médecins grève près de 7 milliards du budget du Québec. Et il est pour le moins étonnant qu’aucun gouvernement depuis des décennies ne se soit demandé si nous pouvions nous les payer ces médecins. Considérant en outre que la population n’a pas vu augmenter l’accessibilité à un médecin de famille depuis 2007. Qu’il s’agit donc d’un problème récurrent. Pour employer une expression populaire, y a du monde qui a dormi au gaz !  Et des politiciens qui ont mis plusieurs paires de gants blancs face au puissant lobby médical.
Le Québec doit vivre selon ses moyens ne cesse de répéter le caporal Coiteux. Mantra que ce gouvernement utilise ad nauseam chaque fois qu’il fait ses coupures. Surtout lorsqu’il s’agit d’ajouter des mesures plus coercitives à l’aide sociale comme c’était le cas cette semaine. Tout cela pour aboutir à des économies de bouts de chandelles considérant le trop payé à des médecins de certaines fameuses cliniques de médecine familiale qui ne respectent pas les contrats qu’elles ont signés. Faut-il rappeler que ces professionnels de la santé bénéficient d’un salaire moyen de près de 200,000$ par année. Il fallait voir un reportage la semaine dernière dans lequel une médecin pour le moins dépenaillée en apparence et faisant partie d’une des cliniques de médecine familiale visée disait sans plus de gène qu’elle pleurait à la fin de ses journées de travail tant elle était accablée par la tâche. Sérieusement, même si elle a ma compassion, cela est dérangeant. Qui veut être soigné par un médecin semblant si peu en contrôle de la situation?
Un médecin de ma connaissance me disait récemment que les omnis allaient devoir se soumettre à une exigence de performance tout à fait normale et souhaitable dans n’importe quel contexte social. Austérité ou pas. C’est une question d’éthique. Surtout lorsque nos études ont été en partie financées par l’état faut-il aussi le rappeler. Que nous sommes redevables à nos concitoyens en quelque sorte. Quand la culture de la recherche de la qualité de vie à tout prix pose un problème évident, il ne devrait pas être si difficile pour des professionnels ayant prêté serment de faire le choix de l’éthique.  C’est-à-dire faire passer la santé de leurs patients avant leur bien-être personnel. Assumer l’ampleur de leur tâche. Et respecter les quotas.
Peut-être que la justice sociale ça commence là !
44 commentaires
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BinneladentAnne Marie D.Mary-France RxMartine RoySam Hlaveilleusesarah deschampsLeck BenafYoung Sun SonElisabeth Turcotte
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Elisabeth Turcotte
Madame St-Germain, je ne comprends pas votre article. Vous dites que vous auriez peur de vous faire soigner par un médecin visiblement en épuisement professionnel mais vous demandez aux médecins de faire passer leurs patients avant leur bien-être personnel donc potentiellement de continuer à travailler encore plus, même si plusieurs sont au bord de l'épuisement professionnel ou en épuisement professionnel. C'est une contradiction.
Une étude américaine rapporte qu'environ 50% des médecins de famille sont en épuisement professionnel (et la proportion chez les femmes monte à 60% car il est encore plus dur de concilier jeune famille et travail exigeant). La proportion des médecins en épuisement ici doit être assez similaire. Cette même étude rapporte que la qualité des soins donnés par les médecins en «burn out» diminue et que le taux de burn out augmente quand le médecin perd le contrôle du nombre d'heures travaillées ou perd de l'autonomie professionnelle. Avec la loi 20, on a la loi parfaite pour mener les médecins de famille en burn out ou à la démotivation ou au bâclage et décourager la relève. Une autre solution plutôt que de forcer des médecins qui se donnent déjà au maximum de leurs capacités à travailler plus, serait de leur donner des outils pour augmenter leur efficacité: l'informatisation des dossiers, une subvention pour du soutien infirmier en cabinet, des campagnes publicitaires de santé publique expliquant comment bien utiliser le système de santé, quand consulter et quand ne pas consulter (ex: pas d'antibiotiques pour un rhume, pas besoin d'amener ta gastro dans la salle d'attente si tu n'es pas visiblement déshydraté, etc.)

Pour terminer, merci de vous être intéressée à la question mais j'espère que vous comprendrez que la plupart des médecins du Québec sont des gens dévoués qui font déjà souvent passer leurs patients avant leur propre santé alors inutile de les épuiser davantage avec une loi comme la loi 20. Travaillons tous ensemble pour améliorer la santé des Québecois et Québecoises de façon constructive et non avec «un bâton»
Young Sun Son
Mme Saint-Germain, je crois que vous faites une très grosse erreur quand vous parlez d'éthique à la fin de votre texte.  Dans aucun code éthique ou déontologique, il est mentionné de faire passer la santé des patients avant le sien.  En fait, cela enfreindrait à la règle numéro un , même en cas d'urgence; s'assurer que l'environnement est sécuritaire pour soi AVANT d'aller aider.  Ce que vous proclamez comme étant de l'éthique, est en fait presque devenir un martyr ou un super-héro qui doit risquer sa santé au nom de la santé des patients.  Peut-être que vous vouliez dire qu'il ne faut pas passer son intérêt personnel avant celui des patients... mais cette notion est utilisée dans un contexte de conflit d'intérêt.  Ce n'est jamais au détriment de son bien-être ou de sa santé personnelle.  
Leck Benaf
Et si les médecins se mettaient à leur compte? Les patients paieront pour leur frais médicaux, le gouvernement feraient des économies et les médecins seraient plus riches et plus maîtres de leur temps.
Ça vous plairait cette éventualité?
À chaque fois que vous parlez des médecins, vous ne faites allusion qu'à leurs honoraires!! C'est comme si on leur faisait l'aumône.

sarah deschamps
le Québec n'apprécie pas ses médecins, avec sa mentalité socialiste, pauvre, inéduquée, considérant que la majorité est sous le bien être social ou invalide. Vous parlez de vos médecins comme si c'est des objets qui vous appartiennent parce que vous avez ''financé leur études''...
ils financent presque tous vos programmes d'aide sociaux avec les impôts ridicules qui leur sont imposés.
Vous voulez couper des salaiares, les traiter de paresseux, manquer d'appréciation envers vos médecins? Ca va tourner contre la population cette mentalité punitive et jalouse, vos médecins vont quitter et les jeunes vont délaisser le programme de médecine familiale.
Bonne chance à cette province.
Gaetane DeRome
Et Mme St-Germain j'aurais honte a votre place quand vous dites ceci:" Il fallait voir un reportage la semaine dernière dans lequel une médecin pour le moins dépenaillée en apparence et faisant partie d’une des cliniques de médecine familiale visée disait sans plus de gène qu’elle pleurait à la fin de ses journées de travail tant elle était accablée par la tâche. Sérieusement, même si elle a ma compassion, cela est dérangeant. Qui veut être soigné par un médecin semblant si peu en contrôle de la situation?"

Surtout lorsqu'on sait qu'une jeune résidente de 27 ans s'est suicidée récemment sous la pression.Et que le ministre de la sante n'a eue aucune compassion.

Relisez-vous avant d’écrire,je vous prie.
http://www.journaldemontreal.com/2015/01/29/encore-les-medecins

Des parabènes présents dans 400 médicaments

LEMONDE | 23.05.11 | 11h39



Environ 400 spécialités pharmaceutiques – certaines utilisées de façon très courante– contiennent des parabènes.
Environ 400 spécialités pharmaceutiques – certaines utilisées de façon très courante– contiennent des parabènes.AFP/JOËL SAGET
Environ 400 spécialités pharmaceutiques – certaines utilisées de façon très courante– contiennent des parabènes, ces conservateurs dont la toxicité et les effets cancérigènes font l'objet de débats scientifiques et dont l'Assemblée nationale a voté l'interdiction le 3 mai. La liste, établie par Le Monde, comprend aussi bien des dentifrices que des médicaments utilisés en chimiothérapie anticancéreuse.
Parmi les produits les plus courants listés : de nombreux cosmétiques pour bébé ; des crèmes comme la Biafine ; de nombreux sirops contre la toux (Clarix, Codotussyl, Drill, Hexapneumine, Humex, Pectosan, Rhinathiol) ; des pansements gastriques (Maalox, Gaviscon) ; des traitements des troubles du transit intestinal (Motilium) ou des nausées et vomissements (Primpéran) ; les formes en suspension buvable de médicaments cardiovasculaires (Cozaar, Vastarel) ou antibiotiques (Josacine, Zinnat) ; des médicaments contre la douleur et la fièvre (formes génériques d'ibuprofène et de paracétamol) ; les traitements de l'asthénie (Sargenor) ; sans oublier les formes génériques de ces médicaments.
Les parabènes sont présents dans des milliers de produits cosmétiques, alimentaires et dans des médicaments afin d'éviter le développement de champignons et de micro-organismes qui pourraient être nocifs pour l'homme. Les conservateurs ont également pour objectif d'empêcher la dégradation du médicament et la baisse de son efficacité, voire d'éviter sa nocivité.
Le 3 mai, les députés avaient créé la surprise en adoptant, contre l'avis du gouvernement, la proposition de loi de Yann Lachaud (Nouveau Centre, Gard) visant à interdire l'utilisation des phtalates, des parabènes et d'alkylphénols, trois catégories de perturbateurs endocriniens.
Le texte doit encore être voté par le Sénat, mais l'inquiétude règne dans les secteurs industriels concernés, qui se verraient obligés, en cas d'adoption définitive, de trouver des substances de remplacement.
Une étude de toxicologie, menée par l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) avec le concours de plusieurs laboratoires pharmaceutiques, est en cours. "Les 400 spécialités pharmaceutiques contenant des parabènes, sous forme méthyle ou propyle, concernent environ 80 firmes titulaires d'autorisations de mise sur le marché", estime Vincent Gazin, responsable de l'unité de toxicologie clinique de l'Afssaps et pilote de l'étude en cours, dont les résultats sont attendus pour novembre.
EFFETS TOXIQUES
L'Afssaps s'est penchée sur la question des parabènes dès 2004, notamment à la suite de la publication d'une étude britannique. Une chercheuse de l'université de Reading, Philippa Darbre, et ses collègues avaient retrouvé des parabènes intacts dans des tumeurs du sein, en particulier du parabène de méthyle. "Cela démontre qu'au moins une partie des parabènes présents dans les cosmétiques, l'alimentation et les produits pharmaceutiques peut être absorbée et retenue dans les tissus du corps humains" sans être transformée, estimaient les auteurs.
Ils précisaient cependant que les études menées jusque-là n'avaient pu déterminer la source et le chemin emprunté par les parabènes retrouvés dans des tissus humains. En revanche, ils évoquaient l'hypothèse d'un effet favorisant le développement de cancers par le biais de l'action proche des oestrogènes qu'exercent les parabènes, décrite depuis 1998.
L'étude de Mme Darbre a fait l'objet de critiques, mais l'Afssaps a préféré engager une évaluation de la sécurité d'emploi des parabènes en constituant un groupe d'experts ad hoc dès juin2004. Le Bulletin des vigilances de l'Afssaps, daté de juin 2005, indiquait que les experts avaient conclu que les parabènes "sont peu toxiques et bien tolérés, bien que des réactions allergiques puissent survenir chez certaines personnes".
Néanmoins, le groupe de scientifiques avait relevé que des études avaient "établi que ces conservateurs pourraient être à l'origine d'une faible perturbation du système endocrinien". Ils précisaient que les données disponibles ne permettaient pas de "caractériser ni de quantifier le risque, notamment cancérigène, qui pourrait être associé à la perturbation endocrinienne".
Les experts soulignaient cependant la mise en évidence d'effets toxiques sur la reproduction chez le jeune rat, par une équipe japonaise, ajoutant que ces études "suggèrent un risque potentiel pour la fertilité masculine", observé avec le parabène de propyle mais pas avec la forme méthyle.

"L'évaluation de 2004 avait laissé des zones d'ombre et l'étude japonaise montrant une altération de la fertilité chez le jeune rat présentait des insuffisances. Nous avons donc décidé de refaire une étude chez le jeune rat avec le parabène de propyle", explique M. Gazin. Six laboratoires pharmaceutiques sont parties prenantes de cette investigation, dont le coup d'envoi a été donné en avril 2010.
Reste que si, à eux seuls, les parabènes n'étaient pas à même de perturber significativement le système hormonal, la question resterait posée d'un effet cumulatif avec des expositions à d'autres perturbateurs endocriniens.
Paul Benkimoun Article paru dans l'édition du 24.05.11

Adoption surprise à l'Assemblée d'un texte interdisant phtalates et parabènes

LEMONDE.FR avec AFP | 03.05.11 | 18h49




Les parabènes, présents par exemple dans les produits de beauté, sont suspectés de provoquer chez les femmes des cancers du sein.
Les parabènes, présents par exemple dans les produits de beauté, sont suspectés de provoquer chez les femmes des cancers du sein.GAMMA/ANOSHA
L'Assemblée nationale a adopté en première lecture, mardi 3 mai, à la surprise générale, une proposition de loi du Nouveau Centre qui interdit l'utilisation de perturbateurs endocriniens comme les phtalates et les parabènes.
Ce texte, auquel s'opposaient le gouvernement et l'UMP, avait été rejeté en avril en commission des affaires sociales, ce qui préfigurait un vote identique en séance publique.
Le vote inattendu (236 voix contre 222 lors d'un scrutin solennel) a été accueilli par des applaudissements dans l'hémicycle, venus des bancs du Nouveau Centre mais aussi de la gauche.
CANCERS DU SEIN ET BAISSE DE LA FERTILITÉ MASCULINE
Certains phtalates, qui assouplissent le plastique, sont déjà interdits pour les jouets et articles pour enfants. Ces substances chimiques sont présentes dans de très nombreux produits : emballages, adhésifs, peinture, vernis à ongles, laque pour les cheveux, parfums... Plusieurs études scientifiques ont montré que les phtalates avaient "des effets délétères sur la mise en place du potentiel reproducteur masculin dans l'espèce humaine", selon l'exposé des motifs du texte.
Les parabènes, présents par exemple dans des produits de beauté (déodorants, crèmes...), sont aussi "suspectés de provoquer chez les femmes des cancers du sein et d'être néfastes à la fertilité masculine".
Lors des débats en séance publique, le 14 avril, le ministre de la santé, Xavier Bertrand, avait proposé d'attendre le résultat d'expertises en cours avant de les interdire, jugeant "prématurée" la proposition de loi du Nouveau Centre. "Les principaux résultats de ces expertises devraient être disponibles entre fin 2011 pour le bisphénol A et fin 2012 pour les autres substances pertubatrices endocriniennes présentes dans les produits grand public", avait-il déclaré.
Point de vue

Arrêtons l'épidémie de cancer, par David Servan-Schreiber

LEMONDE.FR | 07.10.08 | 16h34  •  Mis à jour le 07.10.08 | 20h00

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Aujourd'hui, nous sommes en face d'une épidémie de cancer. Un Français sur quatre mourra de cancer. Et bien souvent avant l'âge de 65 ans. Je suis moi-même du mauvais côté des statistiques depuis mes 31 ans, quand j'ai découvert que j'avais une tumeur au cerveau.
Depuis 1940, nous assistons dans nos sociétés à une augmentation rapide et considérable des cancers les plus fréquents (poumon, sein, prostate, colon). Cela s'explique en partie par le fait que nous sommes plus nombreux à vivre plus vieux – assez longtemps pour développer un cancer – et que nous savons mieux le détecter. Mais ces deux facteurs ne rendent compte que partiellement de l'augmentation des cancers. Car chez les enfants et adolescents, les chiffres progressent aussi : de 1 à 1,5 % annuellement depuis les années 1970. Et il s'agit de cancers que l'on ne dépiste pas.
Pour les cancers les plus fréquents les taux sont beaucoup plus élevés chez nous que dans les pays asiatiques. Mais quand les Asiatiques émigrent en occident, ils rattrapent nos taux en une ou deux générations. Les Asiatiques vivant en Asie ne sont donc pas protégés par leurs gènes, mais par leurs modes de vie et leur environnement.
Les études les plus récentes le montrent : 15 % au plus des cancers sont dus à des facteurs génétiques – et seulement partiellement. 85% ne le sont pas. Pourtant, le cancer frappe bien les familles : une étude marquante publiée dans le New England Journal of Medicine a montré que les enfants adoptés à leur naissance et nés de parents morts de cancer avant l'âge de 50 ans, présentaient autant de risques de cancer que leurs parents adoptifs, non leurs parents biologiques. Ce qui est transmis de génération en génération, ce sont des habitudes et des conditions environnementales. Non des gènes responsables du cancer.
Nous continuons pourtant à consacrer 97 % de notre recherche à des méthodes de soin plus efficace et de détection plus précoce. 3% seulement des moyens sont investis sur le traitement des causes de l'épidémie.
J'ai été un membre fondateur de Médecins sans Frontières aux Etats-Unis. J'ai été volontaire en Irak, au Guatemala, au Tadjikistan et au Kosovo. J'ai vu des épidémies dans les camps de réfugiés. Aucune épidémie de choléra ne peut être stoppée par la détection précoce ni par les traitements antibiotiques – des méthodes par ailleurs précieuses et efficaces pour soigner chaque malade individuellement. Parce que l'épidémie se répand toujours plus rapidement que notre capacité à traiter chaque victime.
Dans les années 1800, l'Europe et les Etats-Unis ont subi plusieurs grandes épidémies de choléra. Partout, elles ont pu être stoppées à chaque fois sans le soutien des antibiotiques. A l'époque, le concept de micro-organisme infectieux n'avait pas même été découvert. Mais nos dirigeants ont eu assez de clairvoyance et de volonté pour agir sur ce qui apparaissait comme la cause environnementale la plus probable : les sources d'eau contaminée. Et de fait, ils ont réussi à arrêter le choléra. Paradoxalement, si les antibiotiques avaient existé à l'époque – et si les responsables de l'époque avaient compté sur eux pour affronter l'épidémie comme nous comptons aujourd'hui sur les traitements anti-cancer – ils n'auraient sans doute jamais réussi à juguler le choléra.
Aujourd'hui, nous disposons d'infiniment plus de données sur les causes probables de l'épidémie de cancer moderne que nos ancêtres n'en disposaient à propos du choléra. Le Fonds international de recherche sur le cancer a conclu, dans son rapport de 2007, que "la plupart" des cas de cancer dans les sociétés occidentales pourraient être évités en changeant nos modes de vie :
- 40 % par des modifications de l'alimentation et de l'activité physique (consommer plus de légumes et de fruits, moins de sucre, moins de viande rouge ; marcher régulièrement ou faire 30 minutes d'exercice physique, six fois par semaine) ;
- 30 % par l'arrêt du tabac ;
- et 10 % par la réduction de la consommation d'alcool.
Il existe aussi maintenant des donnés précises montrant que certains aliments, comme le brocoli, les choux, l'ail, les oignons, le curcuma peuvent aider directement à tuer les cellules cancéreuses et réduire la croissance des nouveaux sanguins dont elles ont besoin pour se développer en tumeurs menaçantes.
La réduction des produits chimiques cancérigènes abondamment présents dans notre environnement moderne (pesticides, estrogènes, benzène, PCB, alkylphénols des produits nettoyants, parabènes dans les cosmétiques et les shampoings, phtalates dans les plastiques, etc.) pourraient également contribuer au recul du cancer, comme le reconnaît désormais une commission de l'INSERM sur "cancer et environnment".
En négligeant d'investir dans les recherches et les programmes préventifs qui découlent de ces faits scientifiques établis, en refusant même d'en discuter, nous créons un sentiment d'impuissance vis-à-vis du cancer. La plupart des gens continuent de voir le cancer comme une sorte de roulette russe génétique, alors qu'il n'en est rien. Face au cancer, nous devons certes éviter de donner de faux espoir, mais nous devons lutter encore plus énergiquement contre le faux désespoir.
Il est temps de pousser notre société, et chacun d'entre nous, à affronter dès aujourd'hui les causes de cette épidémie moderne.
David Servan-Schreiber, psychiatre, professeur de psychiatrie, auteur de Anticancer (Robert-Laffont, 2007).

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