PORTRAIT
Jean Gabriel Jeannot, médecin généraliste critique, mais heureux
Le Neuchâtelois déclare ouvertement que le système de santé suisse est «complètement dépassé». L’avenir est aux soins intégrés
Ils sont les galériens du système de santé, les généralistes, du moins par rapport aux seigneurs que sont les spécialistes cardiologues, oncologues ou gastro-entérologues. Pourtant, Jean Gabriel Jeannot est loin de se plaindre. Au contraire: il ne cache pas son bonheur dans son cabinet de Neuchâtel: «Nous sommes au cœur du système de santé, dans une position privilégiée, à l’interface de la science et de l’être humain.»
Les médecins sont souvent discrets, peu enclins à cultiver leur image dans les médias. Jean Gabriel Jeannot ne fait pas exception. En revanche, il aime y exprimer ses convictions, comme il le fait sur le blog qu’il tient sur le site du Temps. Il y porte son regard pointu sur le système de santé suisse, et y pousse parfois un coup de gueule.
Comme il y a 100 ans…
Cela a été le cas le 25 septembre dernier lorsqu’il a publié ce qui ressemblait à un avis de deuil dans le cadre d’un grand rectangle noir: «Notre système de santé est complètement dépassé», a-t-il asséné. «Le monde de la santé fonctionne encore comme il y a 100 ans, lorsque la médecine n’était constituée que de rares soins aigus», témoigne-t-il.
Mais le monde a changé. Les médecins sont aujourd’hui confrontés à la multiplication des maladies chroniques qu’implique le vieillissement de la population. L’unité médicale idéale n’est plus le médecin isolé dans son cabinet, mais une équipe de professionnels avec au moins un généraliste, deux ou trois spécialistes et le pharmacien. Or, entre ces derniers, les informations ne passent pas le plus souvent. «Le système est beaucoup trop fragmenté. Il faut bien dresser un constat de faillite.» L’avenir est aux réseaux qui intègrent plusieurs acteurs, aux maisons de santé accueillant une dizaine de professionnels sous le même toit, ce qui correspondait plus aux besoins des patients.
Dans ce nouveau système, il faudra rééquilibrer la relation entre le médecin et son patient. A l’heure où les gens se précipitent sur la Toile pour en savoir plus sur leurs maux, le professionnel n’est plus seul à décider. La qualité de cette relation devient cruciale. Des études ont montré que les patients souffrant de maladies chroniques ne prenaient pas 50% des médicaments prescrits, ce que le médecin souvent ne sait pas.
«Le médecin doit informer et proposer des options de traitement. Mais la décision finale, c’est le patient qui la prend», souligne Jean Gabriel Jeannot. Un discours encore impensable dans la bouche d’un médecin voilà 20 ou 30 ans. Il cite le cas d’une femme atteinte d’un cancer du sein. Après son opération, les oncologues lui ont conseillé de faire une chimiothérapie, que la patiente a remise en cause après s’être longuement informée sur internet. Le médecin a soumis le cas aux spécialistes qui lui ont répondu que la patiente avait raison: dans son cas, la chimiothérapie n’était pas indiquée.
Pourtant, Jean Gabriel Jeannot connaît mieux que quiconque les limites de celui qu’il appelle «le docteur Google». Souvent, le moteur de recherche ne crache pas en premier les meilleurs sites. «L’information, parfois commerciale, est de mauvaise qualité et pas du tout adaptée au patient. En général, les recherches des patients sont décevantes et anxiogènes», constate-t-il. Dès lors, le rôle du médecin consiste à orienter le patient vers de bons sites, comme Planète Santé en Suisse romande.
Pour freiner la hausse des coûts de la santé, les caisses multiplient les applications incitant à avoir de bons comportements en offrant des «bonus» en récompense. Sur le fond, Jean Gabriel Jeannot partage ce changement de paradigme à opérer: mieux vaut maintenir les gens en bonne santé plutôt que de devoir les soigner. Mais il se méfie lorsque les assurances commencent à s’investir sur le terrain de la médecine. «Je me demande toujours si elles ne cherchent pas à capter de précieuses données sur leurs assurés.»
Des pistes d’économies
Il discerne pour sa part des pistes d’économies plus prometteuses, comme l’amélioration du tri des patients pour éviter que les services d’urgence des hôpitaux ne soient submergés par les cas de «bobologie». La télémédecine, lorsqu’elle n’est pas coupée du système de santé car pilotée par des caisses, est prometteuse. «Nous aurions de meilleurs soins à moindres coûts en aiguillant vite les patients au bon endroit.»
L’avenir, c’est aussi le dossier électronique du patient, que les hôpitaux seront obligés d’introduire en avril prochain. Jean Gabriel Jeannot en est un fervent partisan, même si les médecins du secteur ambulatoire ne sont pas obligés d’y participer dans l’immédiat. «Le concept est excellent, mais je crains que ce futur dossier ne soit pas très utile car incomplet.»
Les seules données des hôpitaux ne suffiront pas. Ce n’est pas demain qu’en Suisse les patients auront accès à toutes leurs données de santé, alors qu’ils peuvent connaître l’état de leur compte bancaire sur leur téléphone portable. Aux Etats-Unis, c’est pourtant la norme. Le blogueur neuchâtelois en blouse blanche a raison: le système de santé a besoin d’urgentes réformes.
Profil
1964 Naissance à Bienne.
1990 Diplôme de médecin.
2000 Spécialiste en médecine interne générale et ouverture de son cabinet à Neuchâtel.
2017 Blogueur au «Temps».
Médecine
«La santé personnalisée représente un défi majeur pour notre société»
Le
séquençage du génome humain, la collecte, le stockage et
l’interprétation de quantités immenses de données nourrit l’essor de la
santé personnalisée. La Fondation Leenaards finance une dizaine de
projets visant à mieux comprendre et à encadrer cette révolution.
Interview
Le Temps: Vous avez lancé en mai dernier un appel à projets intitulé «Santé personnalisée & Société». Quelle était votre intention de départ?
Peter Brey: La Fondation Leenaards souhaite accompagner des changements de société. Par rapport à la santé personnalisée, nous nous sommes demandé si nous étions face à un sujet dont on parle beaucoup, mais qui ne serait finalement qu’un simple effet de mode, ou si nous vivions une forme de «révolution» qui bouleverse notre regard sur la santé, la maladie et la façon de se faire soigner.
Et la réponse?
P. B.: A priori, il pourrait bien s’agir d’un bouleversement des perspectives de traitement et de prévention, et de la relation médecin/patient. Au-delà des aspects médicaux, ces progrès représentent un défi majeur pour notre société: accès de chacun aux nouvelles thérapies, protection des données, coûts de la santé… Il nous est dès lors paru essentiel de renforcer l’information autour de ce sujet, de faire dialoguer les chercheurs de différentes disciplines, et d’associer la société civile à la réflexion et au débat. L’idée est que chacun puisse à l’avenir être conscient des nombreux enjeux de cette médecine personnalisée.
On peut désormais séquencer son génome pour moins de 1000 francs…
Patrick Francioli: En effet. C’est à la fois relativement abordable si l’on raisonne au niveau de l’individu, et cher si l’on veut séquencer le génome d’un très grand nombre de personnes. Car c’est bien la masse des données qui permettra de détecter les facteurs à l’origine des maladies, de développer des capacités de prédiction et de mieux orienter les traitements.
Les facteurs génétiques sont-ils seuls en cause?
P. F.: Non. A la collecte des données génétiques s’ajoute celle de données environnementales, géographiques et comportementales. Ce qui permettra de mieux comprendre le déterminisme des maladies et, espérons-le, de les guérir mais aussi de les prévenir et ainsi de prolonger la période pendant laquelle nous resterons en bonne santé.
Séquencer son génome peut être assez anxiogène. Tout le monde n’est pas prêt à faire le pas…
P. F.: Effectivement. La première étape est donc celle du consentement des individus à procéder ou non à ce séquençage. Voilà pourquoi nous avons retenu, parmi les 60 dossiers reçus, un projet de médecins du CHUV et des HUG qui développera un outil pédagogique d’aide à la décision. Dois-je prendre connaissance de mes prédispositions, par exemple pour le développement de la maladie d’Alzheimer, alors qu’il n’existe, à ce jour, pas de traitement avéré? Ma réponse sera-t-elle la même le jour où une molécule «préventive» sera disponible? Dans le même esprit, plusieurs des neuf projets retenus traitent de l’interaction entre patients, chercheurs, spécialistes et médecins généralistes confrontés eux aussi à la révolution génomique.
Justement, les généralistes sont-ils bien armés?
P. F.: Depuis toujours, les médecins font de la médecine prédictive sur la base des connaissances disponibles – par exemple l’influence du cholestérol sur les maladies cardio-vasculaires. Ce qui change, c’est qu’ils disposent désormais d’une masse considérable de données: le Big Data. Reste à les comprendre et à les interpréter. Comme l’exprime très bien le généticien Denis Duboule, professeur à l’EPFL et à l’Université de Genève, nous sommes au début d’un travail de digestion qui va prendre du temps. Pour les généralistes – comme d’ailleurs pour beaucoup de spécialistes, pharmaciens et autres professionnels de la santé –, il s’agira de progressivement faire un plus large usage de ces nouvelles ressources.
S’agit-il d’un mouvement irréversible?
P. F.: On ne peut pas arrêter cette évolution. Je suis de plus convaincu qu’il s’agit d’un progrès.
P. B.: Nous voulons contribuer à accompagner ce mouvement, dans ses aspects prometteurs et dans toute sa complexité, en prenant aussi en compte les questions de société qu’il soulève. Cette initiative résulte d’une réflexion lancée par la Fondation Leenaards il y a dix-huit mois. Réunis pour y réfléchir, une soixantaine d’acteurs d’horizons différents sont arrivés à la conclusion qu’il fallait associer chercheurs et société civile pour débattre de ces questions.
Quid des dérives dans l’utilisation des données médicales?
P. F.: On parle beaucoup de l’utilisation abusive de nos données médicales personnelles. A mon avis, ce risque est un peu surévalué. Deux domaines pourraient cependant être touchés en priorité: l’emploi et les assurances. Mais avec des mesures techniques et un cadre légal solide, on devrait pouvoir gérer ce risque. Quelques-uns des neuf projets retenus traitent d’ailleurs directement ou indirectement de cette problématique.
Quelles sont les possibilités mais aussi les limites de cette médecine prédictive dans la prévention?
P. F.: Ce n’est pas simple, effectivement. Vous avez d’un côté les maladies monogéniques qui sont déterminées par un seul gène, comme leur nom l’indique. On les connaît relativement bien. Mais pour la plupart des maladies, c’est plus compliqué. Vous vous trouvez le plus souvent face à des facteurs multiples. L’hypertension, par exemple, est déterminée par plusieurs gènes qui interagissent. Sans oublier l’environnement, qui joue aussi un rôle. Comme d’ailleurs l’hygiène de vie. On se dirige certes vers une médecine individualisée, mais pas à pas.
Vous lancez aussi cette semaine la plateforme www.santeperso.ch. Avec quel objectif?
P. B.: Pour une majorité de la population, le concept de santé personnalisée reste encore très flou. Pour d’autres, il n’est tout simplement pas encore un sujet de préoccupation. Et pourtant, sous ce vocable, on touche à des développements qui vont profondément marquer notre société. C’est pour faire comprendre ce changement de paradigme et ses enjeux sociétaux – et pour en débattre largement – que nous lançons cette plateforme, en collaboration avec Médecine & Hygiène.
Au final, les développements de la santé personnalisée permettront-ils une baisse des coûts de la santé comme l’affirme par exemple Xavier Comtesse dans son livre «Santé 4.0. Le tsunami du numérique»? Ou va-t-on au contraire assister à une explosion des coûts?
P. F.: Difficile à dire. L’histoire de la médecine nous montre qu’en général les coûts augmentent de manière constante. Toutefois, il peut y avoir parfois une découverte qui change la donne. Prenez l’hépatite C, qui affectait les malades pendant vingt-cinq ans avant qu’elle ne dégénère en cirrhose puis en cancer du foie avec tous les coûts induits. On a maintenant un médicament qui coûte environ 100 000 francs, que vous prenez sur trois mois et qui vous guérit définitivement. C’est très cher, mais cela évite souffrances et coûts ultérieurs. Autre exemple: en radiologie, le programme d’intelligence artificielle Watson d’IBM modifie le rôle du médecin. Là encore, baisse potentielle des coûts. Par contraste, l’individualisation des thérapies, avec le développement de médicaments sur mesure, risque d’entraîner une hausse mais pourrait aussi éviter beaucoup de traitements inutiles.
P. B.: La santé personnalisée se développe dans un système de santé déjà soumis à des pressions majeures: évolution démographique, numérisation, ou encore limites du système de financement. Dans un tel contexte, nous avons besoin, plus que jamais, d’un véritable dialogue qui permette d’accompagner les changements à venir.
Voir le détail des projets sur www.santeperso.ch
https://www.letemps.ch/sciences/sante-personnalisee-represente-un-defi-majeur-societe
LES BLOGUES
J’aime être médecin, mais le Canada ne m’aime pas
Je ne recherche aucun mot de remerciement, aucune tape dans le dos. Je tiens simplement à exprimer ma frustration par rapport aux choses que je lis et entends au sujet des médecins ontariens.
FangXiaNuo via Getty Images
Je ne suis pas la seule à être aussi passionnée et dévouée envers mes patients. Sachant que seuls des médecins masculins seraient de garde sur le prochain quart, une collègue a accepté de rester en salle d'urgence plus longtemps pour traiter l'une de mes patientes victime d'abus sexuels. Je connais un chirurgien capable d'opérer de 7 heures à 23 heures sans manger ni aller aux toilettes, et qui revient à l'hôpital dès le lendemain matin pour discuter avec moi. Je connais également un spécialiste qui est sur appel chaque jour, sans exception, car aucune autre personne ne peut faire ce qu'il fait en région rurale.
Lorsque je consulte moi-même mon médecin et obtiens une ordonnance, aucune assurance médicaments ne couvre mes dépenses.Lorsque je consulte moi-même mon médecin et obtiens une ordonnance, aucune assurance médicaments ne couvre mes dépenses. Si je prends un congé de maladie en raison de la grippe (ce que je fais rarement), je ne serai pas payée, mais je devrai tout de même payer les salaires du personnel de la clinique et des concierges ainsi que la facture d'électricité.
Les normes du travail, quelles normes du travail?
Ma profession n'est assujettie à aucun nombre maximal d'heures de travail, aucun temps supplémentaire rémunéré, aucun salaire minimum et aucun temps de repos minimal entre deux quarts de travail. Nous recevons un plein salaire de médecin lorsque nous commençons à travailler de manière indépendante aux alentours de 30 ans (ou de 35 ans en ce qui concerne les chirurgiens). Nous passons les dix premières années de notre carrière à rembourser des prêts universitaires d'environ 200 000 dollars (les frais de scolarité, à eux seuls, s'élèvent en moyenne à 25 000 dollars par année sur quatre ans). Puis nous passons les 20 années suivantes à essayer d'épargner pour notre retraite, car nous n'avons droit à aucune pension.On me fait passer pour une personne avare, surpayée, qui pratique l'évasion fiscale.J'adore mon travail, mais on dirait que le Canada ne m'aime pas. On me fait passer pour une personne avare, surpayée, qui pratique l'évasion fiscale. Même le personnel infirmier que je côtoie au quotidien semble penser que je ne devrais pas avoir droit à la protection fiscale actuellement conférée aux petites entreprises. Le droit d'incorporation a été octroyé aux médecins afin de limiter nos salaires. Oui, vous avez bien lu : nos salaires n'ont pas augmenté et ne parviennent même pas à suivre la courbe de l'inflation.
Imaginez un patron qui vous dirait : « Le trimestre est difficile, nous ne pouvons pas t'accorder une augmentation, alors nous allons cotiser à un fonds de pension pour te permettre de prendre une retraite au moment opportun. » Puisque vous aimez votre travail, ne penseriez-vous pas qu'il serait raisonnable d'accepter cette offre?
L'année suivante, imaginez que ce même patron vous dise : « Tu te rappelles de la pension dont nous avons parlé? Nous avons besoin de cet argent, alors tu n'auras aucune augmentation et aucune pension. » Qu'allez-vous faire? Démissionner? Faire la grève? Dans l'un ou l'autre cas, des gens pourraient mourir.
Je n'ai pas choisi la carrière de médecin pour l'argent, mais parce que j'aime ce travail. Malheureusement, je suis en train de perdre le feu sacré. Pourquoi renoncerais-je à la partie de soccer de mon fils pour traiter une mère qui vient de recevoir un diagnostic de cancer du sein? Pourquoi renoncerais-je à dire bonne nuit à mes propres enfants parce que l'enfant de quelqu'un d'autre a fait une chute et brisé sa jambe? Pourquoi annulerais-je pour la troisième fois une sortie avec mon conjoint parce que mon dernier patient de la journée semble faire une crise cardiaque et a besoin d'être stabilisé?
Je tiens simplement à exprimer ma frustration par rapport aux choses que je lis et entends au sujet des médecins ontariens.Je ne recherche aucun mot de remerciement, aucune tape dans le dos. Je tiens simplement à exprimer ma frustration par rapport aux choses que je lis et entends au sujet des médecins ontariens. Comme dans toute profession, il est vrai que certaines personnes ne font pas ce travail pour les bonnes raisons. Or, la grande majorité d'entre nous prend votre santé à cœur au point d'être nous-mêmes mal en point.
Cher Justin Trudeau, chère Kathleen Wynne et chers amis libéraux : j'accepterai volontiers de renoncer à mon incorporation et aux avantages fiscaux dont je bénéficie lorsque je serai traitée comme les autres travailleurs et travailleuses, et plus particulièrement comme les fonctionnaires. Vous allez payer les frais de ma clinique et je viendrai travailler tous les jours en ayant droit à un horaire régulier, aux heures supplémentaires rémunérées, aux congés de maladie, aux jours de vacances, aux avantages sociaux et à une pension de retraite.
En vérité, je sais que vous n'avez pas les moyens de m'offrir tout cela. Mais avec la réforme fiscale que vous proposez, ni vous ni moi ne pourrons plus assumer les coûts de telles mesures.
Ce billet de blogue a d'abord été publié sur le HuffPost Canada. http://quebec.huffingtonpost.ca/dre-brenna-velker/j-aime-etre-medecin-mais-le-canada-ne-m-aime-pas_a_23211172/
Que peut faire le patient?
Le monde a changé et l'univers de la santé n'échappe pas à cette règle.
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Le monde a changé
Aux portes de l'évidence, nul n'a besoin d'enseigne. Le monde a changé et l'univers de la santé n'échappe pas à cette règle. Du côté des professionnels de la santé, tout le monde s'entend pour constater que tant au niveau de la prévention, du diagnostic et des traitements, les avancées médicales et technologiques ont franchi des pas de géants. Du côté des patients, les changements semblent moins apparents. Je dis bien « semblent », parce qu'il ne faut pas regarder bien longtemps pour s'apercevoir que là aussi la vague de changements déferle allègrement. Alors que les patients peuvent en une fraction de seconde obtenir des millions de références sur les maladies qui les concernent, le système de santé continue de tourner en faisant abstraction de ce que le patient vit et ressent en présence de tant d'informations.Le docteur Google est souvent perçu comme une source d'ennui pour les professionnels de la santé et une source d'information et parfois d'inquiétude pour bien des patients.Le docteur Google est souvent perçu comme une source d'ennui pour les professionnels de la santé et une source d'information et parfois d'inquiétude pour bien des patients. Les professionnels doivent s'adapter aux patients qui ne sont plus des malades passifs que l'on observe 10 minutes et à qui on remet une prescription. Les gens sont plus informés et ont besoin de réponses à leurs questions. Ils ont aussi besoin d'être rassurés face à leurs inquiétudes. C'est le devoir des professionnels de la santé de répondre à ces nouvelles exigences des patients. Et ceux qui résistent à ces changements ne sont pas au bout de leur peine. Déjà, des logiciels existent et peuvent à partir d'une bonne description de symptômes donner un diagnostic avec une précision de plus de 65%. Connaissant les progrès exponentiels dont l'informatique et l'intelligence artificielle sont capables, les patients auront bientôt accès du bout des doigts à un diagnostic précis. Bien sûr, il ne sera jamais question d'envoyer tous les professionnels à la retraite, mais ceux-ci doivent s'adapter à cette nouvelle réalité que de traiter des patients mieux informés et parfois plus anxieux.
Les pas franchis par le patient
De plus en plus, nous nous conformons aux consignes de base de prévention : saine alimentation, activité physique, tabagisme en baisse, etc. Tout n'est pas parfait, mais les messages passent de mieux en mieux. Le patient a aussi appris à s'informer, à consulter l'internet et à poser des questions. Et on le voit disposé à continuer la prise en charge de sa santé et de sa condition physique. Il lui restera qu'à se montrer plus exigeant face aux professionnels qui résistent à ces changements. Dans la relation patient – partenaire, les patients sont devenus de bons partenaires. Il leur restera à trouver parmi les professionnels des partenaires convaincus.Le patient et le système de santé
Ce nouveau partenariat entre les patients et les professionnels est inéluctable et transformera la façon dont les soins seront dispensés. Ce partenariat devra aussi modifier l'esprit qui anime la gestion de tout le système de santé. Depuis le temps que les ministres nous parlent de mettre le patient au centre du système, le temps deviendra bientôt révolu d'attendre après ces mielleuses promesses de nos gouvernants. Le patient – partenaire devra aussi s'imposer et exprimer clairement ses attentes et ses commentaires face au système de santé. Il devra s'impliquer à tous les niveaux qu'il s'agisse de l'évaluation des hôpitaux, des cliniques médicales et même des professionnels de la santé.J'ai eu l'occasion de discuter avec un médecin intensiviste (spécialiste des soins intensifs) lors de mon passage à l'émission radiophonique d'Isabelle Maréchal. Celui-ci relatait une expérience qui avait eu lieu dans un secteur de New York où le taux de complications à la suite des chirurgies cardiaques était de beaucoup supérieur à la moyenne nationale. On décida alors de publier les noms de tous les chirurgiens et hôpitaux en accordant une note à chacun. Après cette évaluation, les hôpitaux et les médecins les moins bien cotés ont pris des mesures pour améliorer leurs résultats et la situation s'est rétablie.
Il faudra donc mettre en place des facilités pour que, d'une part le système de santé puisse évaluer ses professionnels de la santé et ses institutions, d'autre part les patients puissent aussi fournir une évaluation tant du personnel soignant que des institutions et finalement que tous ces résultats soient accessibles à tous : ministère, travailleurs de la santé et institutions.
Une nouvelle façon de penser la santé
Il s'agit là d'une des multiples façons de forcer l'amélioration des soins et services aux patients. Il n'y aura jamais un messie qui arrivera au ministère et règlera tous les problèmes par un miracle quelconque. La solution ou plutôt les solutions viendront bien sûr de nos professionnels, mais aussi et surtout des patients. Mais pour susciter leur implication, encore faut-il montrer qu'au moins on est prêt à les écouter.C'est dans cet esprit que je lancerai en octobre prochain une plateforme électronique sous forme d'un mensuel : Journal le patient du Québec. J'ai déjà invité tous les intervenants du monde de la santé à y participer comme les ordres professionnels, les syndicats professionnels, les associations professionnelles, les diverses facultés universitaires impliquées, les divers partis politiques, les groupes de patients, les compagnies pharmaceutiques, etc.
Aujourd'hui, c'est à vous tous patients passés, présents et futurs que je lance mon invitation pour que vous me fassiez parvenir vos histoires de bonheur ou d'horreur, vos commentaires et vos suggestions. Vous pouvez me faire parvenir vos textes à l'adresse courriel suivante : patient@journallepatientduquebec.com.
C'est à nous qu'il appartient de prendre et notre santé et notre système de santé en main. Alors nous réussirons à créer un système de santé digne de ce nom et nous serons vraiment devenus des patients partenaires http://quebec.huffingtonpost.ca/jacques-beaulieu/que-peut-faire-le-patient_a_23204107/
Accès aux soins - Les médecins ont des idées pour le futur "plan de lutte contre les déserts médicaux"
Agnès Buzyn, la ministre des Solidarités et de la Santé, a
lancé la concertation en vue de la présentation - en principe à la
rentrée - d'un nouveau plan de lutte contre les déserts médicaux. Les
premiers sollicités dans ce cadre ont été les représentants des médecins
libéraux, directement concernés par les difficultés de remplacement des
praticiens partant en retraite et le peu d'appétence des jeunes
médecins pour l'exercice libéral.
Parmi les revendications traditionnelles des médecins libéraux figure notamment la remise en cause de "l'hospitalo-centrisme" des études de médecine. Pour éviter ce phénomène, qui n'incite pas les jeunes médecins à s'installer en libéral et encore moins dans les territoires isolés, la CSMF propose de rendre obligatoires les stages dans des cabinets libéraux dès les premières années d'étude. La période de l'internat devrait par ailleurs comporter au moins douze mois de stages en médecine générale et au moins six mois dans les disciplines de spécialités.
Pour faciliter ces stages, ceux-ci ne devraient rien coûter aux étudiants ou aux internes, grâce à une prise en charge des frais de déplacement et à l'attribution d'indemnités de logement (voire à des logements gratuits).
Dans le même esprit, les collectivités territoriales devraient également être mises à contribution pour faciliter l'installation de la famille du médecin dans un désert médical, par exemple en aidant le conjoint à trouver un travail ou en proposant des places en crèche pour les jeunes enfants.
En revanche, la CSMF n'a pas évoqué le développement des maisons de santé pluridisciplinaires, alors qu'Emmanuel Macron - il l'a redit lors de la Conférence nationale des territoires - prévoit d'en doubler le nombre (environ 1.200 actuellement). Reprenant une position traditionnelle, le syndicat est également plus que réservé sur la révision du numerus clausus, alors que là encore, le chef de l'Etat a indiqué le 17 juillet que "les réformes structurelles, mais qui prendront du temps, seront prises pour rouvrir les numerus clausus qui ont construit, on le sait bien, cette rareté aujourd'hui du personnel médical sur les territoires".
Au demeurant, le président de la CSMF a mis lui-même un certain bémol à la lutte contre les déserts médicaux, en expliquant que le modèle du médecin de campagne de "Monsieur Bovary" (qui, dans le roman de Flaubert, n'est en réalité pas médecin, mais simple officier de santé) est révolu et qu'il n'est pas question d'installer un praticien "au pied de chaque clocher de France". Sur ce point, la CSMF et les autres syndicats de médecins libéraux se félicitent du refus d'Agnès Buzyn - comme sa prédécesseure Marisol Touraine - de remettre en cause la liberté d'installation.
Des stages obligatoires et conséquents en médecine libérale
Le premier syndicat à faire valoir son point de vue est la CSMF, principal représentant des médecins libéraux, une profession à la représentation profondément divisée. Son président, le docteur Jean-Paul Ortiz, a ainsi été reçu le 21 juillet à l'Elysée et au ministère de la Santé.Parmi les revendications traditionnelles des médecins libéraux figure notamment la remise en cause de "l'hospitalo-centrisme" des études de médecine. Pour éviter ce phénomène, qui n'incite pas les jeunes médecins à s'installer en libéral et encore moins dans les territoires isolés, la CSMF propose de rendre obligatoires les stages dans des cabinets libéraux dès les premières années d'étude. La période de l'internat devrait par ailleurs comporter au moins douze mois de stages en médecine générale et au moins six mois dans les disciplines de spécialités.
Pour faciliter ces stages, ceux-ci ne devraient rien coûter aux étudiants ou aux internes, grâce à une prise en charge des frais de déplacement et à l'attribution d'indemnités de logement (voire à des logements gratuits).
Dans le même esprit, les collectivités territoriales devraient également être mises à contribution pour faciliter l'installation de la famille du médecin dans un désert médical, par exemple en aidant le conjoint à trouver un travail ou en proposant des places en crèche pour les jeunes enfants.
Il n'y aura pas un praticien "au pied de chaque clocher"
Sur les avancées technologiques, la CSMF n'est pas hostile au développement de la télémédecine - que le chef de l'Etat prévoit de "déverrouiller massivement" -, mais sous réserve que les médecins bénéficient d'une aide en matière d'équipement et que les actes accomplis en télémédecine soient rémunérés par l'assurance maladie "selon la grille tarifaire habituelle".En revanche, la CSMF n'a pas évoqué le développement des maisons de santé pluridisciplinaires, alors qu'Emmanuel Macron - il l'a redit lors de la Conférence nationale des territoires - prévoit d'en doubler le nombre (environ 1.200 actuellement). Reprenant une position traditionnelle, le syndicat est également plus que réservé sur la révision du numerus clausus, alors que là encore, le chef de l'Etat a indiqué le 17 juillet que "les réformes structurelles, mais qui prendront du temps, seront prises pour rouvrir les numerus clausus qui ont construit, on le sait bien, cette rareté aujourd'hui du personnel médical sur les territoires".
Au demeurant, le président de la CSMF a mis lui-même un certain bémol à la lutte contre les déserts médicaux, en expliquant que le modèle du médecin de campagne de "Monsieur Bovary" (qui, dans le roman de Flaubert, n'est en réalité pas médecin, mais simple officier de santé) est révolu et qu'il n'est pas question d'installer un praticien "au pied de chaque clocher de France". Sur ce point, la CSMF et les autres syndicats de médecins libéraux se félicitent du refus d'Agnès Buzyn - comme sa prédécesseure Marisol Touraine - de remettre en cause la liberté d'installation.
«Payer un médecin comme un coiffeur, est-ce normal?»
SantéPour les médecins genevois, la révision des tarifs médicaux entraînera une baisse de la qualité des soins.
Ce matin, la baisse de la rémunération des médecins n’était pas l’argument-phare mis en avant par l’AMG qui estime que la réforme menace avant tout la politique de santé et la qualité des soins délivrés au patient. Scandalisée que le conseiller fédéral Alain Berset se soit laissé guider par les assureurs, qui ont eux-mêmes «fixé le minutage de certaines opérations», l’AMG estime que les nouveaux tarifs ne tiendront plus compte des années d’études et des responsabilités qui pèsent sur les épaules des médecins. Bien moins rémunérés, certains gestes ne seront plus rentables pour les structures qui les pratiquent et basculeront donc vers l’hospitalier. «Au lieu de travailler à perte, certains collègues choisiront d'hospitaliser leurs patients», explique le Dr Alain Lironi, chirurgien pédiatre.
Envisageant le point de vue du patient, Michel Matter ajoute que «le temps de la consultation sera réduit à vingt minutes. En outre, les médecins auront droit, tous les trois mois, à trente minutes pour tout ce qui ressort de l’explication avec l’entourage du patient, sa famille ou les soins à domicile. C’est la vision des assureurs qui triomphe: les patients doivent être tous uniformes et en pleine santé.»
Vice-président de l'AMG, le Dr Didier Châtelain, médecin de famille, abonde en ce sens: «Comment réduire la consultation à 20 minutes avec une personne âgée qui a de la difficulté pour se déshabiller? Avec un patient souffrant d’une maladie neurologique? Cela prend beaucoup plus de temps! Et quid de l’examen physique, qui est la base de la médecine de premier recours? Enlever du temps à la consultation représente une absurdité totale et une négation du souhait de la population qui, en 2014, a voté à plus de 80% pour le développement des soins de base!»
Un argument partagé par Jean-Paul Derouette, président de la section genevoise de l’Association suisse des patients (ASSUAS): «La qualité des soins sera péjorée. Encore une fois, on fait fi de la volonté populaire et on nous impose le diktat des assureurs. Les 700 millions de francs d’économie prévus par cette réforme seront «compensés» par une surcharge de coûts dans l’hospitalier, que couvriront nos impôts.»
A noter que H +, l’association nationale des hôpitaux suisses, s’oppose également à la réforme tarifaire, prédisant qu’elle alourdira de 300 millions de francs le déficit des hôpitaux et des cliniques dans le secteur ambulatoire et contribuera à faire baisser la qualité des soins.
Développement suit (24 heures)
http://www.24heures.ch/suisse/payer-medecin-coiffeur-estce-normal/story/10799913
Opinion
Hôpitaux: des responsabilités claires et des règles équitables renforcent la confiance
Pris à
parti par l’ancien député Jacques-André Haury, le ministre vaudois de la
Santé Pierre-Yves Maillard défend son modèle de rémunération des
médecins cadres des hôpitaux
Un médecin et ancien député m’a fait un drôle de
procès dans ces pages il y a quelques jours. Expert en politologie, il
imputait à mon inspiration «socialiste» le souci de fixer quelques
règles communes dans le statut des médecins cadres des hôpitaux vaudois.
C’est faire beaucoup d’honneur au socialisme et cacher sous de bien
grands mots des enjeux très prosaïques.
Ce plafond est censé exister depuis longtemps. Seulement, comme on ne définit pas de manière claire le plein-temps d’un médecin cadre dans les hôpitaux régionaux, il peut être facilement contourné et dépassé. L’équité, l’économicité, le souci d’éviter la surenchère salariale commandent de régler enfin précisément les choses. Le Conseil d’Etat l’a fait, en améliorant fortement la part fixe du revenu et les indemnités de garde, ce qui avantagera les internistes, les pédiatres, les intensivistes, notamment, qui ne bénéficient pas des abondants revenus liés à la patientèle privée.
S’agit-il de «socialisme» ou de simple bon sens? Je pencherais pour la seconde hypothèse. De même, puisque mon contradicteur y a fait allusion, quand le célèbre ancien patron de la neurologie du CHUV avait détourné plusieurs millions de francs en profitant du fait qu’il pouvait déclencher le paiement de factures par sa seule signature, je n’ai pas pensé faire injure à la conception libérale de la médecine en imposant, après ça, la signature collective à deux…
Ce règlement du Conseil d’Etat est désormais attaqué par cinq requêtes à la Cour constitutionnelle. Les règles salariales, pourtant généreuses, chacun en conviendra, sont bel et bien querellées dans trois de ces recours. Sous les grands mots, l’opposition à ce texte relève donc bien aussi de la défense des avantages matériels que procure la situation actuelle.
En plus de douze ans de mandat, j’ai sans fléchir combattu toutes les tentatives d’imposer la «liberté de contracter» qui donnerait aux assureurs un droit de vie et de mort économique sur les médecins. J’ai été au contraire un défenseur de la sécurité économique que l’ordre juridique actuel garantit à la médecine. Elle la protège et nous protège tous d’influences commerciales peu compatibles avec les exigences d’une santé publique indispensable à un Etat démocratique. Mais ce soutien fondamental ne peut conduire à cautionner les excès.
Pierre-Yves Maillard est conseiller d'Etat vaudois, à la tête du Département de la santé et de l'action sociale, et président du gouvernement.https://www.letemps.ch/opinions/2017/02/23/hopitaux-responsabilites-claires-regles-equitables-renforcent-confiance
La tribune de Jacques-André Haury:
La méfiance de Pierre-Yves Maillard offense les médecins vaudois
De quoi s’agit-il?
Le Conseil d’Etat vient d’adopter, après des mois de consultation qui ont sensiblement modifié le projet, un règlement visant à faire appliquer un plafond de rémunération valable dans tous les hôpitaux vaudois et instaurant un minimum de règles de fonctionnement nécessaires à la continuité et à la sécurité des soins. La modestie de ce texte frappera d’ailleurs le lecteur intrigué par cette controverse.Plafond à 550 000 francs par an
Le salaire des médecins devra désormais se composer d’un fixe d’un peu plus de 180 000 francs par an, plus 500 francs d’indemnité par journée de garde, plus des compléments de revenu pour des mandats particuliers ou pour l’activité personnelle ambulatoire ou privée, pourvu que le revenu global n’excède pas 550 000 francs.Ce plafond est censé exister depuis longtemps. Seulement, comme on ne définit pas de manière claire le plein-temps d’un médecin cadre dans les hôpitaux régionaux, il peut être facilement contourné et dépassé. L’équité, l’économicité, le souci d’éviter la surenchère salariale commandent de régler enfin précisément les choses. Le Conseil d’Etat l’a fait, en améliorant fortement la part fixe du revenu et les indemnités de garde, ce qui avantagera les internistes, les pédiatres, les intensivistes, notamment, qui ne bénéficient pas des abondants revenus liés à la patientèle privée.
S’agit-il de «socialisme»?
D’autre part, il est demandé que quelqu’un assume la responsabilité du fonctionnement de chaque service et que les médecins cadres indiquent dans un planning leurs présences et leurs absences, dans l’intérêt d’une bonne organisation du travail avec les autres professionnels de l’hôpital, et donc du patient.S’agit-il de «socialisme» ou de simple bon sens? Je pencherais pour la seconde hypothèse. De même, puisque mon contradicteur y a fait allusion, quand le célèbre ancien patron de la neurologie du CHUV avait détourné plusieurs millions de francs en profitant du fait qu’il pouvait déclencher le paiement de factures par sa seule signature, je n’ai pas pensé faire injure à la conception libérale de la médecine en imposant, après ça, la signature collective à deux…
Ce règlement du Conseil d’Etat est désormais attaqué par cinq requêtes à la Cour constitutionnelle. Les règles salariales, pourtant généreuses, chacun en conviendra, sont bel et bien querellées dans trois de ces recours. Sous les grands mots, l’opposition à ce texte relève donc bien aussi de la défense des avantages matériels que procure la situation actuelle.
Défense des médecins
Pourtant, il y a sans doute de la sincérité dans les réactions de ceux qui ne voient pas l’utilité de ces nouvelles règles, puisque leur engagement a garanti sans elles une médecine de qualité. C’est que justement les règles ne sont pas faites pour le beau temps. Des crises sérieuses, constatées ces dernières années dans nos hôpitaux, ont montré que le dévouement et l’engagement individuels ne suffisent pas toujours et qu’une meilleure définition des responsabilités est nécessaire pour prévenir ou résoudre ces crises avant qu’elles ne prennent de trop grandes proportions. Sur ce point, le règlement du Conseil d’Etat reprend d’ailleurs exactement les dispositions que la société des médecins et la fédération des hôpitaux ont elles-mêmes introduites dans leur contrat collectif. S’il faut que l’Etat leur donne une force obligatoire, c’est simplement que certains, malgré leur signature, ne les appliquent pas.En plus de douze ans de mandat, j’ai sans fléchir combattu toutes les tentatives d’imposer la «liberté de contracter» qui donnerait aux assureurs un droit de vie et de mort économique sur les médecins. J’ai été au contraire un défenseur de la sécurité économique que l’ordre juridique actuel garantit à la médecine. Elle la protège et nous protège tous d’influences commerciales peu compatibles avec les exigences d’une santé publique indispensable à un Etat démocratique. Mais ce soutien fondamental ne peut conduire à cautionner les excès.
Cour constitutionnelle
Il convient désormais de laisser la Cour constitutionnelle statuer. Dans cette attente, avec tout le Conseil d’Etat, je continue à assurer à tous les professionnels qui assurent le bon fonctionnement de nos hôpitaux un grand respect et une totale confiance en leur engagement.Pierre-Yves Maillard est conseiller d'Etat vaudois, à la tête du Département de la santé et de l'action sociale, et président du gouvernement.https://www.letemps.ch/opinions/2017/02/23/hopitaux-responsabilites-claires-regles-equitables-renforcent-confiance
Universités
En manque de médecins, le Tessin se dote d’une faculté de biomédecine
L’Université de la Suisse italienne étend son offre en accord avec les objectifs nationaux
L’Université de la Suisse italienne (USI)
ajoute une corde à son arc. Une faculté de biomédecine vient s’adjoindre
aux départements d’économie, de communications, d’architecture et de
science informatique de la jeune université, fondée en 1996. Dès 2020,
elle inaugurera son master en médecine humaine, avec une première
cohorte de 70 étudiants.
«Notre but est de contribuer à la stratégie nationale de former davantage de médecins résidents dans le pays», explique Boas Erez, recteur de l’USI. Il ajoute que les cours seront dispensés en anglais. L’accès au master sera réservé aux étudiants dotés d’un bachelor proposé par un des partenaires de l’USI, soit l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) ou les universités de Bâle et Zurich.
Environ 40% des médecins pratiquant dans le canton sont Italiens, souligne-t-il, certains sont frontaliers, d’autres résidents. Il ajoute toutefois que les médecins œuvrant dans le secteur public tessinois jouissent d’une convention collective de travail – une première en Suisse. Du coup, le dumping salarial ne les concerne pas, ce qui n’est en revanche pas le cas dans le privé.
La Confédération a investi 100 millions de francs dans la formation de nouveaux médecins pour 2017-2020, dont 10 sont destinés à la faculté tessinoise. En produisant au moins 70 médecins par an, le Tessin participera à l’objectif national d’en former 1350 annuellement dès 2025. La faculté formera également des chercheurs et collaborera avec l’École universitaire professionnelle de la Suisse italienne (SUPSI) à la formation d’infirmières et d’infirmiers. Sept professeurs ont déjà été sélectionnés. Cinq autres, choisis parmi des médecins exerçant dans les hôpitaux et les cliniques tessinoises, s’ajouteront d’ici 2020.
https://www.letemps.ch/suisse/2017/02/05/manque-medecins-tessin-se-dote-dune-faculte-biomedecine
«Notre but est de contribuer à la stratégie nationale de former davantage de médecins résidents dans le pays», explique Boas Erez, recteur de l’USI. Il ajoute que les cours seront dispensés en anglais. L’accès au master sera réservé aux étudiants dotés d’un bachelor proposé par un des partenaires de l’USI, soit l’École polytechnique fédérale de Zurich (EPFZ) ou les universités de Bâle et Zurich.
Pénurie au niveau national
La Suisse souffre d’une insuffisance de professionnels de la santé notamment parce que le nombre de places dans les facultés de médecine est limité et que de nombreux médecins partent à la retraite chaque année. Au Tessin, la pénurie est particulièrement criante. «Les étudiants en médecine poursuivant leur cursus ailleurs en Suisse tendent à ne pas revenir», constate Simone Ghisla de l’Association des médecins assistants et des chefs de clinique du Tessin (ASMACT).Environ 40% des médecins pratiquant dans le canton sont Italiens, souligne-t-il, certains sont frontaliers, d’autres résidents. Il ajoute toutefois que les médecins œuvrant dans le secteur public tessinois jouissent d’une convention collective de travail – une première en Suisse. Du coup, le dumping salarial ne les concerne pas, ce qui n’est en revanche pas le cas dans le privé.
D’autres mesures également envisageables
Pour l’ASMACT, la nouvelle faculté de biomédecine est de bon augure pour pallier le manque de médecins dans le canton. D’autres mesures simples sont aussi envisageables, comme favoriser la flexibilité du temps de travail. De nombreuses femmes médecins souhaiteraient travailler à temps partiel, surtout lorsqu’elles ont de jeunes enfants. «Si ce n’est pas possible, elles renoncent à pratiquer. Il s’agit là d’une perte énorme, note Simone Ghisla. D’autant plus si l’on considère que la formation d’un médecin s’élève à près d’un million de francs.»La Confédération a investi 100 millions de francs dans la formation de nouveaux médecins pour 2017-2020, dont 10 sont destinés à la faculté tessinoise. En produisant au moins 70 médecins par an, le Tessin participera à l’objectif national d’en former 1350 annuellement dès 2025. La faculté formera également des chercheurs et collaborera avec l’École universitaire professionnelle de la Suisse italienne (SUPSI) à la formation d’infirmières et d’infirmiers. Sept professeurs ont déjà été sélectionnés. Cinq autres, choisis parmi des médecins exerçant dans les hôpitaux et les cliniques tessinoises, s’ajouteront d’ici 2020.
https://www.letemps.ch/suisse/2017/02/05/manque-medecins-tessin-se-dote-dune-faculte-biomedecine
le médecin star du net
Société
Le quotidien du médecin
Baptiste Beaulieu, le médecin star du net
Agé de
31 ans, ce médecin généraliste français installé dans la région de
Toulouse, raconte sa vie professionnelle sur un blog et dans des romans.
Les gens adorent.
Il s’est affublé d’un pseudonyme de cardiologue
monégasque, mais il exerce comme médecin généraliste dans la périphérie
toulousaine. Baptiste Beaulieu, 31 ans, est une star du net: «sept à
huit millions» de lecteurs le suivent sur son blog, «Alors voilà. Journal de soignés/soignants réconciliés»,
créé en 2012. Mais voilà quoi? Son quotidien, auparavant aux urgences,
depuis 2016 en cabinet. Ce qu’il écrit passionne. Il y a du «Grey’s
Anatomy» dans sa façon d’enchaîner les scènes. Il y a surtout le monde
d’aujourd’hui. Et comme ce monde-là est souvent très dur, les choses
sont dites avec une ironie tendre et un mordant amical.Le surmenage, la déprime, le burn-out
La médecine actuelle est une médecine de guerre au front du ball-trap social. Des bronchites, des foulures, des brûlures, des coupures? Vieux tableau, qui avait toutefois le mérite d’être clair. Le nouveau l’est moins: surmenage, déprime, troubles musculo-squelettiques. «La Sécurité sociale a râlé un jour parce que j’avais prescrit un mois d’arrêt de travail à une femme qui venait de faire une fausse couche. C’était sa troisième. Moralement, elle était au bout du rouleau», se remémore Baptiste Beaulieu, de passage à Paris pour la promotion de son dernier livre, un roman, «La ballade de l’enfant gris» (éditions Mazarine, 414 pages).Roux tirant sur le blond, de beaux yeux verts, un regard empli de poings rageur, il est le héros de ses récits. Thaumaturge moderne, il guérit les écrouelles par millions et par le truchement d’Internet. Il pratique une littérature du «care», fondamentalement bienveillante. Ses patients – les vrais – sont des enseignants «cassés» par leurs élèves, des aides-soignants débordés par la tâche, perclus de douleurs dorsales.
Un visage doux, mais déterminé
Ce visage doux et déterminé a vu le jour en 1985 à Toulouse, dans le Sud-Ouest de la France. Père conseiller financier dans une banque, mère cadre à la «Sécu». Il a deux grandes sœurs. A 15 ans, Baptiste hésite entre des études de médecine et de littérature. Ce sera donc la blouse blanche, dans le chef-lieu de la Haute-Garonne, une ville agréable. A l’université, il s’amuse plus qu’il ne travaille, redouble sa première année, réussit très bien la suite. Etudiant, il effectue des stages à l’étranger, à Hanoï au Vietnam, à Bombay. L’Inde, terre de mégachocs, qu’il avait déjà visitée avec ses parents, à 6 ans. De là, peut-être, sa vocation de bon docteur, se dit-il parfois.Littéraire contrarié, épris de Maupassant, Pessoa et Gabriel Garcia Marquez dont il apprécie le «réalisme magique», il écrit, le soir, après la journée de travail – jusqu’à quarante patients. Il écrit pour dire la cruauté du mal, la bravoure des infirmières et des infirmiers, ses «amis» dans la vie, qui font face. Pour évacuer son stress, s’agacer des insupportables assis face à lui, dans son cabinet. Sur son blog, personne n’est jamais cité nommément, cela va de soi. Les situations comptent à l’égal des personnes et sont autant de petites morales de l’existence. Il se souvient d’un patient mort à 86 ans. «Pendant trente ans, tous les matins à neuf heures, il s’est rendu au cimetière, avec un bouquet, sur la tombe de sa femme. Il faut les dires, les choses belles», justifie-t-il.
Profil
1985: Naissance à Toulouse1991: Voyage en Inde, à 6 ans
2004: Entrée en faculté de médecine
2012: Création du blog «Alors voilà. Journal de soignés/soignants réconciliés»
2013: Remise de sa thèse sur la réconciliation entre les soignants et les souffrants; sortie de son premier roman, «Alors voilà. Les 1001 vies des urgences», Le livre de poche, 306 pages.
2016: Installation dans un cabinet de généralistes
2018: Sortie prévue de son prochain roman
https://www.letemps.ch/societe/2017/01/21/baptiste-beaulieu-medecin-star-net
22 médecins de famille en plus pour la région
Il est urgent de s’intéresser aux médecins et de mieux les accompagner dans leur carrière »
Mieux
écouter et accompagner les médecins. Telle est la démarche adoptée au
sein de l’établissement de santé mentale de la Vallée de l’Arve, en
Haute-Savoie. Sa directrice des ressources humaines aussi en charge des
affaires sociales, Élodie Pelletier, a mis en place un processus
d’accompagnement innovant. Il repose sur des échanges permanents.
L’analyse
Comment
adapter la gestion des ressources humaines aux réalités des affaires
médicales ? C’est la question que s’est posée Élodie Pelletier,
directrice des ressources humaine (DRH) et directrice des affaires
sociales au sein de l’établissement public de santé mentale (EPSM) de la
Vallée de l’Arve, à La Roche-sur-Foron (Haute-Savoie). La jeune femme
est arrivée en poste durant l’été 2015. « Je venais du secteur médico-social, j’étais novice sur les questions d’affaires médicales », se souvient-elle. Ce qui l’a interpellée en arrivant ? « Les
médecins étaient un peu à part. Sans doute volontairement mais aussi en
partie parce que la gestion de ces personnels est différente. Ils sont
rarement considérés comme des agents à part entière d’un établissement »,
témoigne la DRH. Dès son arrivée, Élodie Pelletier a donc suivi des
formations dans le domaine. Et elle le reconnaît volontiers : « J’ai
appliqué ce que j’ai appris en formation et les réflexes du
médico-social pour mettre en place la politique d’affaires médicales de
l’EPSM ». Une politique spécifique à l’établissement, que la DRH a
présenté et fait valider par la commission médicale d’établissement
(CME).
« Les médecins sont rarement considérés comme des agents à part entière d’un établissement. »
Ce qui change dans la méthode ? Les échanges sont réguliers et programmés. « Nous avons mis en place des réunions hebdomadaires. Puis chaque mois, je rencontre le président de la CME »,
souligne la DRH. Le point est alors fait sur les effectifs mais aussi
la politique d’accompagnement, la permanence des soins, les différents
projets à impulser, etc. À ces échanges s’ajoutent des entretiens
individuels. Et cela commence dès l’arrivée des professionnels. Trois à
six mois après sa prise de poste, chaque médecin est reçu par la
directrice des affaires sociales. « Il s’agit d’accompagner leur intégration dans l’établissement« , résume Élodie Pelletier. Un questionnaire leur est transmis, « une fiche d’entretien », validée également par la CME. Un moyen d’écoute et de dialogue mais aussi une manière de fidéliser les médecins. « Je
vérifie si le poste est en adéquation avec les attentes du
professionnel mais aussi avec ce qui lui a été présenté pendant son
recrutement. C’est important de vérifier, dans ces terres de pénuries où
nous pourrions avoir tendance à survendre nos postes, de voir s’ils
répondent aux attentes du nouvel arrivant », reconnaît la DRH. Cet
entretien permet de vérifier aussi les connaissances du site, une visite
supplémentaire peut par exemple être programmée si le professionnel le
souhaite. Les points positifs de l’accueil sont abordés comme les points
négatifs. Relations avec la hiérarchie et avec l’ensemble des agents,
connaissances de l’intranet, du classement des différentes procédures,
attentes personnelles, conditions matérielles et besoins de formation,
observations sur le projets médicales sont aussi évoquées.
Mieux connaître les médecins
Sur
les trente-six médecins que compte l’établissement, déjà trois
titulaires ont passé cet entretien depuis l’arrivée d’Élodie Pelletier
dans l’établissement mais aussi chaque remplaçant. Comment ont-il réagi
face à ce procédé innovant ? « Il n’y a aucun malaise. Les médecins
sont au contraire rassurés de l’accueil. L’un d’eux m’a par exemple
confié être étonné car en dix ans de carrière, c’est la première fois qu’il rencontrait le directeur des affaires sociales de son établissement »,
poursuit la DRH. L’expérience offre des avantages à l’EPSM comme aux
professionnels eux-mêmes. Elle a permis par exemple de mieux connaître
les centres d’intérêt de certains médecins et de leur proposer des
participations à des groupes de travail sur des projets qui les
intéressent tout particulièrement. « C’est une manière pour nous de
mieux les accompagner, d’évoquer leur projet de carrière et de les
solliciter dans les domaines qui correspondent mieux à leurs compétences
et à leurs centres d’intérêt », souligne la directrice.
Ressources humaines et cellule qualité
Des rendez vous mensuel « cellule qualité et affaires médicales » ont aussi été créés. « Dans les hôpitaux, on a souvent tendance à oublier la cellule qualité mais c’est très important de travailler conjointement », reconnaît Élodie Pelletier. Cette commission analyse les fiches d’événements indésirables qui ont été rédigées par le corps médical ou qui sont en lien avec l’exercice médical. Elle est composée de la direction des affaires médicales, du président de la CME, des chefs de pôles et responsables de secteur. Elle a déjà permis des actions correctives, la rédaction de certains protocoles et procédures ou la mise en place de nouvelles formations médicales.« Ils s’agit de créer un lien entre direction et médecins pour penser les perspectives, ensemble, au sein de l’EPSM voire aujourd’hui au sein du groupement hospitalier de territoire (GHT). »
Un classeur carrière personnel
De
nouvelles rencontres sont programmées tout au long de la carrière des
médecins. Tous les deux ans, un entretien de carrière sera bientôt prévu
pour chacun d’entre eux. Il sera mis en place au premier trimestre
2017. Cela va permettre d’échanger sur les projets menés, ceux à
instaurer et les possibles évolutions de leurs besoins en formation
notamment. « Ils s’agit de créer un lien entre direction et médecins
pour penser les perspectives, ensemble, au sein de l’EPSM voire
aujourd’hui au sein du groupement hospitalier de territoire (GHT)
et d’harmoniser les formations médicales. Par exemple si nous
souhaitons ouvrir telle ou telle structure, nous savons si dans notre
équipe un médecin est intéressé pour suivre cette évolution et une
formation vers ce nouveau secteur« , explique Élodie Pelletier. Et la directrice des affaires sociales souhaite aller au-delà : « Nous
sommes en train de mettre en place un projet qui passera prochainement
devant la CME pour validation. Il s’agit de créer un « classeur carrière
personnel » remis à chaque médecin de la structure ». Livret
d’accueil, fiches de procédures, formulaire de frais de déplacement,
attestation de formation et copie des entretiens y trouveront place dans
différents intercalaires. Un outil qui devrait vite devenir précieux
pour le professionnel tout comme la commission de formation médicale. Il
devrait être mis en place courant 2018.
Analyse des pratiques
En place également au sein de l’EPSM de la Vallée de l’Arve : un groupe d’analyse des pratiques médicales. Chaque trimestre, un médecin extérieur à l’établissement vient animer ce groupe, le temps d’un midi. « Il s’agit d’échanger pourquoi pas sur des cas cliniques, sur les nouveautés, de discuter dans le cadre d’une réunion de chefs de pôle et responsables de secteur », détaille Élodie Pelletier. Il est aussi question de la rédaction du nouveau projet social et managérial de l’établissement auxquels les médecins, comme les autres agents, sont associés.Du mieux-être au travail
Au
quotidien, la recherche de dialogue est constante. Les médecins sont
par exemple encouragés à rencontrer un médecin du travail lorsque cela
est nécessaire, des dispenses d’astreintes et de gardes temporaires
peuvent être envisagées si besoin. « Des mesures très bien accueillies dans les équipes, nous constatons beaucoup de compréhension« , résume la DRH. Et selon elle, il était urgent de mettre en place ces dispositifs : « Nous mettons tellement de choses en place pour les personnels non médicaux, pourquoi ne pas en faire autant avec les médecins ?
En arrivant, j’ai eu quelques chocs en voyant que tel ou tel médecin
avait suivi des formations dans telle ou telle discipline et que,
lorsque des postes de ce type ont été ouverts, personne n’a pensé à leur
proposer. Je pense que cela s’est fait de manière involontaire, par
méconnaissance de leurs souhaits et de leur compétences, c’est à cela
que j’ai voulu remédier« , confie-t-elle. Mais ce dispositif,
applicable dans une petite structure, est-il transposable au plus gros
établissements ? « Mes collègues de ressources humaines me font souvent cette remarque :
« c’est facile pour toi, tu n’as que trente-six médecins à suivre ».
Mais je suis aussi directrice des ressources humaines de l’ensemble des agents. Ce
doit être une vraie volonté de l’établissement. Bien sûr, cela pourra
évoluer, s’adapter à la réalité de chaque établissement mais je crois
que c’est possible, avec de l’écoute et du dialogue« , soutient Élodie Pelletier.
Son
initiative a d’ailleurs trouvé un écho dans le travail de l’Inspection
générale des Affaires sociales (Igas) qui l’a consultée pour son rapport
en préparation sur la vie au travail des médecins et leur
accompagnement. L’établissement a aussi reçu les encouragement du Centre
national de gestion (CNG) pour cette démarche innovante. Même si la DRH
a été surprise — « je ne pensais pas que la démarche était inédite, cela me semble aller de soi » —, cela l’encourage à poursuivre dans cette voie. « Dans
un contexte de pénurie, de souffrance au travail, il est urgent de se
doter d’un accompagnement et de viser une qualité de vie au travail plus
adaptée. Il sera toujours plus agréable de travailler ensemble et de
continuer à constituer des projets pour rendre un meilleur service à nos
usagers« , conclut Élodie Pelletier.
Article Hospimedia
par Clémence Nayrac
par Clémence Nayrac
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> Recruteurs : quelles sont les règles d’exercice pour un médecin étranger ?
> Témoignage : « Des démarches assez compliquées »
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> Recruteurs : quelles sont les règles d’exercice pour un médecin étranger ?
> Témoignage : « Des démarches assez compliquées »
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Aujourd’hui, un médecin sur quatre est né à l’étranger et un médecin sur dix environ est titulaire d’un diplôme européen ou extra-européen. Qui sont ces médecins ? Pourquoi et comment exercent-ils en France ? Comment et où s’installent-ils ?
Il est difficile de cerner tous les enjeux de cet aspect complexe de la démographie médicale tant la situation est confuse, ne serait-ce que dans sa dénomination. La question des « médecins étrangers », selon l’appellation couramment utilisée dans les médias, recouvre en effet plusieurs réalités bien différentes : Français ayant obtenus leur diplôme à l’étranger et exerçant en France, médecins étrangers ayant obtenu leur diplôme en France et y poursuivant leur carrière ou encore, médecins nés à l’étranger mais ayant effectué leurs études et exerçant depuis lors en France.
Conscient d’un véritable phénomène de société, le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) étudie le phénomène des « flux migratoires » et des « trajectoires » de ces professionnels de santé*. Un travail qui bat en brèche certains préjugés sur le sujet.
Il est difficile de cerner tous les enjeux de cet aspect complexe de la démographie médicale tant la situation est confuse, ne serait-ce que dans sa dénomination. La question des « médecins étrangers », selon l’appellation couramment utilisée dans les médias, recouvre en effet plusieurs réalités bien différentes : Français ayant obtenus leur diplôme à l’étranger et exerçant en France, médecins étrangers ayant obtenu leur diplôme en France et y poursuivant leur carrière ou encore, médecins nés à l’étranger mais ayant effectué leurs études et exerçant depuis lors en France.
Conscient d’un véritable phénomène de société, le Conseil national de l’Ordre des médecins (Cnom) étudie le phénomène des « flux migratoires » et des « trajectoires » de ces professionnels de santé*. Un travail qui bat en brèche certains préjugés sur le sujet.
Ce que disent les chiffres
Un médecin sur quatre inscrit à l’Ordre est né à l’étranger
19,6
% des médecins inscrits à l’Ordre sont nés dans un pays européen ou
extra-européen (dont 75 % hors de l’Union européenne), soit 54 168
médecins sur 276 354 ( 285 840 médecins : chiffre au 1er janvier 2016)
recensés au tableau de l’Ordre en 2014.
Environ 80 % exercent une activité régulière. 44,2% de ces 54 168 médecins sont de nationalité française. Ces professionnels sont majoritairement des hommes quinquagénaires bien que leur profil diffère sensiblement selon leur pays d’origine : la moitié des médecins nés dans l’Union européenne sont ainsi des femmes alors qu’elles représentent seulement un tiers des effectifs nés hors de l’UE.
Environ 80 % exercent une activité régulière. 44,2% de ces 54 168 médecins sont de nationalité française. Ces professionnels sont majoritairement des hommes quinquagénaires bien que leur profil diffère sensiblement selon leur pays d’origine : la moitié des médecins nés dans l’Union européenne sont ainsi des femmes alors qu’elles représentent seulement un tiers des effectifs nés hors de l’UE.
Médecin étranger ne rime pas avec diplôme étranger
Un
médecin sur dix environ est titulaire d’un diplôme européen ou
extra-européen. Pour autant, diplôme étranger ne rime pas
systématiquement avec médecin étranger, loin de là. Bon nombre des
médecins de nationalité étrangère ont suivi leurs études en France (22
568 sur un total de 215 531 médecins en activité). La situation varie
toutefois beaucoup selon le pays d’origine. Ainsi, près de 80 % des
médecins maghrébins ont été diplômés dans l’Hexagone (72 % des
Marocains, 90 % des Tunisiens et 86 % des Algériens), ce qui n’est pas
anodin lorsque l’on sait que 25 % des praticiens étrangers installés en
France viennent d’Algérie et 11,5 % du Maroc. Le phénomène est en
revanche inverse pour les médecins nés en Europe : seuls 11,5 % des
médecins nés en Roumanie sont par exemple titulaires d’un diplôme
français. Enfin, autre enseignement de l’étude : 40,9 % des médecins
titulaires d’un diplôme non français l’ont obtenu en Roumanie.
Les médecins nés en Europe boostent le nombre de médecins étrangers en France
Le
nombre de médecins en activité régulière, nés hors de France et
inscrits au tableau de l’Ordre a augmenté de 10,4 % entre 2007 et 2014,
notamment avec l’arrivée massive de médecins nés dans un pays de l’Union
Européenne (+58,9 %) comparativement aux médecins nés hors de France ou
hors de l’Union Européenne (+0,3%).
Les médecins diplômés à l’étranger en forte augmentation
Les
effectifs des médecins titulaires d’un diplôme européen ou
extra-européen ont également augmenté de 60 % depuis 2007. Cette
tendance devrait « se confirmer d’ici à 2020 pour atteindre plus de 30 000 médecins titulaires d’un diplôme obtenu hors de France
», selon le Cnom, en particulier en raison de la pression du numerus
clausus. Une réglementation qui n’est sans doute pas étrangère à
l’augmentation exponentielle du nombre de personnes formées en Roumanie,
lequel a augmenté de 520 % depuis l’entrée de ce pays dans l’Union
européenne en 2007. Le sujet des Français qui vont se former à
l’étranger préoccupe le Cnom qui suit de près ce dossier.
Ils ne choisissent pas la France par hasard
Pourquoi
les médecins étrangers choisissent-ils d’exercer en France ? Leur
trajectoire personnelle est souvent explicable par certains facteurs
récurrents, à la fois historiques et socio-économiques. Plus d’un
médecin sur deux est ainsi originaire de ce que le Cnom appelle le «
Petit Maghreb », à savoir l’Algérie, le Maroc et la Tunisie. Cette
proportion s’explique par l’héritage historique et les relations
particulières qui unissent la France à cette région du monde. Quant aux
médecins nés dans un pays de l’Union européenne, ceux originaires de
Roumanie sont les plus nombreux et leur nombre a même augmenté de 377,3 %
au cours de la période 2007-2014. Cet exode massif s’explique par « la quête d’une vie meilleure » (meilleurs salaires et conditions d’exercice), expliquait au Nouvel Observateur
le Docteur Calin Ciofu, vice-Président de l’association des médecins
roumains de France, au moment de la sortie du rapport. Pour le Cnom,
cette croissance devrait se poursuivre pour atteindre, « en 2020, plus de 2 700 médecins généralistes nés en Roumanie et inscrits à un tableau de l’Ordre ».
Le salariat plutôt que l’exercice libéral : pas une solution à la désertification
Les
médecins titulaires d’un diplôme européen ou extra-européen
privilégient très majoritairement l’exercice salarié (62,4 %) alors que
ce pourcentage n’est que de 43,6 % pour les titulaires d’un diplôme
français. En outre, ces
nouveaux arrivants s’installent principalement dans les régions les
mieux dotées, telles que l’Île-de-France (qui regroupe 29 % d’entre
eux), Rhône-Alpes et Paca alors que la Corse, le Limousin et la
Franche-Comté, régions en situation de forte tension, apparaissent comme
les moins attractives. Le constat est donc sans appel : « Ces
populations nouvelles ne suffisent pas à résoudre la problématique de
l’accessibilité aux soins de premier recours et en accès direct », selon le Cnom.
Une mise sous tension des pays d’origine
Ces
flux migratoires ne sont pas sans conséquence dans les pays d’origine
des médecins, certains se retrouvant de plus en plus dépourvus de
professionnels de santé. « Des décisions communautaires tenant compte
des mouvements migratoires des étudiants et des praticiens doivent être
prises au niveau de l’Union Européenne. Cela pourrait passer par une
harmonisation du numerus clausus entre États membres et déboucher sur un
débat éthique sur les conséquences des flux migratoires », suggère le Cnom.
Médecine versus chirurgie : quelles spécialités exercent les praticiens étrangers ?
85 % des médecins étrangers exercent une spécialité médicale, les plus prisées sont :- Médecine générale
- Psychiatrie
- Anesthésie-réanimation
- Radiodiagnostic-imagerie médicale
- Ophtalmologie
- Gynécologie-obstétrique
- Chirurgie générale
- Chirurgie orthopédique-traumatologie
Quelles sont les règles d’exercice en France pour un médecin étranger ?
Qui peut venir
exercer en France ? Quels diplômes, quelles équivalences sont
nécessaires ? Il existe diverses situations selon que l’on a obtenu son
diplôme dans un pays de l’Union européenne, dans un pays ayant passé des
accords spécifiques avec la France ou dans un autre pays.
Pour les médecins à diplôme d’un pays de l’UE
Une directive européenne a institué, en 2005, une reconnaissance automatique des diplômes européens. Sous réserve d’une « attestation de conformité
», les médecins titulaires d’un diplôme européen relèvent donc de la
libre circulation, laquelle les autorisent à s’installer où ils le
souhaitent. La révision de la directive, en 2013, a permis de préciser
certains critères mais plusieurs professions médicales de certains états
membres ont demandé de les renforcer.
Pour les Praticiens à diplôme étranger hors UE (PADHUE) n’ayant pas validé la Procédure d’autorisation d’exercice (PAE), la procédure peut prendre plusieurs années au risque de donner lieu à des situations difficiles pour les praticiens. Ils sont recrutés par les établissements sous le statut de praticien attaché associé ou d’assistant associé et ne sont donc pas autorisés à pratiquer un plein exercice. Ils ne sont pas inscrits à l’Ordre, ne peuvent pas prescrire ni assurer des astreintes. Et s’ils peuvent assumer des gardes, celles-ci sont placées sous la responsabilité directe d’un praticien senior. En revanche, une fois l’avis favorable de la commission d’autorisation d’exercice et l’autorisation ministérielle obtenue, ces médecins peuvent bien sûr exercer en plein exercice.
Les difficultés que rencontrent aujourd’hui les recruteurs sont essentiellement d’ordre réglementaire plutôt que managérial. En effet, la réglementation est tellement complexe qu’il peut parfois être difficile pour eux de s’y retrouver. Il est en outre nécessaire de prévoir un encadrement senior suffisant. Il faut bien identifier la chaîne de responsabilité, notamment concernant la prescription. Tout cela nécessite d’être rompu à la réglementation car les Ordres sont, à juste titre, très fermes sur ces points. Il est également nécessaire que le candidat ait une maîtrise suffisante de la langue française.
Quid de l’accueil de ses homologues français ? Aucune difficulté particulière, relève Lucas. Au contraire, « cela s’est très bien passé mais j’imagine que l’accueil dépend aussi du caractère et du comportement de chacun. Bien sûr, j’ai ressenti une certaine distance au départ, comme si on m’étudiait, mais c’est tout à fait normal ! »
Aujourd’hui, Lucas se consacre avec passion à sa spécialité, l’oncologie : « Le centre de cancérologie où je travaille fonctionne très bien et j’aime exercer en France. C’est ici que je peux mettre en pratique toutes les choses que j’y ai apprises. Mon objectif est désormais de me spécialiser davantage car l’oncologie est une spécialité particulière, très innovante, qui nécessite notamment de travailler avec une équipe importante, adaptée et formée. Mais je ne souhaite pas déménager, je me sens bien ici ».
Pour les médecins dits à diplôme hors UE
Il existe deux voies possibles les concernant :- S’inscrire en faculté de médecine puis passer le concours de première année de médecine avant de se présenter à l’Examen classant national (ECN) si le cursus antérieur le permet. Selon leur classement, ces médecins peuvent ensuite effectuer un internat de trois ans en médecine générale afin d’obtenir un Diplôme d’études spécialisé (DES) en médecine générale.
- Passer les épreuves de la Procédure d’autorisation d’exercice (PAE) qui consiste à vérifier les connaissances dans la spécialité choisie. Il faut également accomplir trois ans de fonction hospitalière en France sous des statuts spécifiques requis par les textes en vigueur. Alors seulement le dossier de demande d’autorisation d’exercice de la spécialité sera examiné par une commission du Cnom, laquelle donnera un avis favorable ou défavorable à l’inscription au tableau de l’Ordre des médecins.
Avant tout des difficultés d’ordre réglementaire
La réglementation qui régit les flux des médecins étrangers – ressortissants de l’Union européenne ou non – est complexe et comporte des procédures différentes selon les cas de figure. Des établissements font face à une pénurie dans certaines spécialités quand d’autres sont situés dans des territoires pouvant apparaître comme moins attractifs. D’autres encore accueillent des médecins étrangers dans une perspective de formation dont des professionnels de santé venus effectuer leur troisième cycle en France. Sans compter le cas de figure qui concerne les médecins déjà titulaires du diplôme de docteur en médecine dans leur pays d’origine qui viennent effectuer leur spécialisation en France dans le cadre d’un DFMS ou d’un DFMSA (gérés par l’Université de Strasbourg). Enfin, il est également possible d’accueillir des stagiaires associés. Ces derniers viennent suivre une formation de quelques mois en France mais n’ont pas vocation à y exercer de manière pérenne, sous réserve qu’il existe une convention de coopération bilatérale entre le pays d’accueil et le pays d’origine.Pour les Praticiens à diplôme étranger hors UE (PADHUE) n’ayant pas validé la Procédure d’autorisation d’exercice (PAE), la procédure peut prendre plusieurs années au risque de donner lieu à des situations difficiles pour les praticiens. Ils sont recrutés par les établissements sous le statut de praticien attaché associé ou d’assistant associé et ne sont donc pas autorisés à pratiquer un plein exercice. Ils ne sont pas inscrits à l’Ordre, ne peuvent pas prescrire ni assurer des astreintes. Et s’ils peuvent assumer des gardes, celles-ci sont placées sous la responsabilité directe d’un praticien senior. En revanche, une fois l’avis favorable de la commission d’autorisation d’exercice et l’autorisation ministérielle obtenue, ces médecins peuvent bien sûr exercer en plein exercice.
Les difficultés que rencontrent aujourd’hui les recruteurs sont essentiellement d’ordre réglementaire plutôt que managérial. En effet, la réglementation est tellement complexe qu’il peut parfois être difficile pour eux de s’y retrouver. Il est en outre nécessaire de prévoir un encadrement senior suffisant. Il faut bien identifier la chaîne de responsabilité, notamment concernant la prescription. Tout cela nécessite d’être rompu à la réglementation car les Ordres sont, à juste titre, très fermes sur ces points. Il est également nécessaire que le candidat ait une maîtrise suffisante de la langue française.
Trajectoire personnelle : « Des démarches assez compliquées »
Lucas a la voix posée et l’accent chantant de son Argentine natale où il a obtenu son diplôme de médecine voilà neuf ans. « Je suis ensuite parti faire ma spécialisation en oncologie en Espagne, à Madrid, pour être en lien avec la recherche clinique, raconte-t-il. Lorsque j’ai terminé ma spécialité, en 2011, j’ai quitté l’Espagne pour la France ». Un choix qui ne doit rien au hasard : « Au départ, je ne cherchais pas forcément à travailler. Je voulais surtout me spécialiser et apprendre toujours plus. » Néanmoins, la transition ne s’est pas forcément faite très facilement : « Même s’il y a des normes européennes, les démarches pour venir étudier et exercer en France restent assez compliquées. J’ai par exemple obtenu l’homologation de mon diplôme argentin lors de mon arrivée en Espagne. Il est donc devenu valide pour tous les autres pays d’Europe… sauf la France qui a réévalué mon diplôme de base ! » Si cela s’est soldé par un succès pour Lucas, la procédure n’en a pas moins été un poids : « C’est très lourd administrativement, en termes de temps et de moyens. Et cela complique beaucoup les choses. »Quid de l’accueil de ses homologues français ? Aucune difficulté particulière, relève Lucas. Au contraire, « cela s’est très bien passé mais j’imagine que l’accueil dépend aussi du caractère et du comportement de chacun. Bien sûr, j’ai ressenti une certaine distance au départ, comme si on m’étudiait, mais c’est tout à fait normal ! »
Aujourd’hui, Lucas se consacre avec passion à sa spécialité, l’oncologie : « Le centre de cancérologie où je travaille fonctionne très bien et j’aime exercer en France. C’est ici que je peux mettre en pratique toutes les choses que j’y ai apprises. Mon objectif est désormais de me spécialiser davantage car l’oncologie est une spécialité particulière, très innovante, qui nécessite notamment de travailler avec une équipe importante, adaptée et formée. Mais je ne souhaite pas déménager, je me sens bien ici ».
* Après celle de 2007, la dernière étude
complète sur le sujet publiée par le Cnom date de novembre 2014 et
porte sur les chiffres au 1er janvier 2014. À ce jour, on ne dispose
donc pas de données actualisées concernant le phénomène des médecins nés
en France mais ayant obtenu leur diplôme à l’étranger.
Pour aller plus loin, du côté réglementaire
- Instruction du Gouvernement n°DGOS/RH1/RH2/RH4/2014/318 du 17 novembre 2014 relative aux conditions d’exercice et de recrutement en France des médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes et pharmaciens titulaires de diplômes étrangers : http://bit.ly/2fJmJ4f
- Exercice en France – Conseil national de l’Ordre des médecins : http://bit.ly/2fVQ2Pk
- Directive 2013/55/ue du Parlement européen et du Conseil du 20 novembre 2013 modifiant la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et le règlement (UE) : http://bit.ly/2fVXMRl
Références bibliographiques :
- « Atlas de la démographie médicale en France, situation au 1er janvier 2016 », Conseil national de l’Ordre des médecins.
- « Les flux migratoires et trajectoires des médecins, situation en 2014 », Conseil national de l’Ordre des médecins : http://bit.ly/2gc1iF5
- « Les médecins à diplômes européens et extra-européens exerçant en France, situation au 1 janvier 2012 », Conseil national de l’Ordre des médecins : http://bit.ly/2fPyu46
De médecin de famille à médecin référent : des mots qui résument le mal-être des soignants
Par Jean-Christophe Seznec
Psychiatre
LE PLUS. Le 8 novembre dernier, les infirmiers, les aides-soigants et les personnels administratifs hospitaliers manifestaient pour dénoncer leurs conditions de travail. Ce 24 novembre, ce sont les praticiens libéraux qui se mobilisent contre "la dégradation du système de santé". Pour Jean-Christophe Seznec, co-Auteur de "Médecine en danger, qui va nous soigner demain ?" (First), ils sont au bout du rouleau.
Édité par Henri Rouillier Auteur parrainé par Rozenn Le Carboulec
Illustration d'un médecin généraliste avec une patiente à Paris (BALEYDIER/SIPA)
Ce 24 novembre 2016, les soignants vont encore descendre dans la rue pour crier leur désespoir. En effet, cette profession souffre et est au bord de l’agonie. 20% des internes en médecine ont eu des idées noires, 40% des professionnels de santé sont en burn out, 112 médecins se sont suicidés depuis le début de l’année, 30% des postes de praticiens hospitaliers sont vacants, 8% des internes souhaitent s’installer en libéral.
Les médecins ne conseillent plus à leurs enfants de faire médecine. Les infirmières quittent leur métier au bout de 7 ans en moyenne, dégoûtées de ne pas pouvoir exercer leur métier du fait des contraintes procédurales.
Contre l'industrialisation de la médecine
L’origine de cette dégradation est une médecine que l’on tente d’industrialiser et de régenter de façon administrative et financière, afin de réguler son coût. L’État s’est interposé progressivement entre le soigné et le soignant, venant gripper l’action de soin. Si cette démarche était, au départ, pleine de bonnes intentions dans l’objectif de faciliter les relations médecins/patients, elle a dérivé dans un rôle d’évaluation pour ensuite la régenter jusqu’à l’étouffer en lui faisant perdre par son essence.
La médecine meurt de cette normalisation administrative qui laisse l’humain de côté. Pourtant c’est la relation humaine qui soigne et qui rend efficient tout acte technique. Les termes pour nommer un médecin nous en disent beaucoup sur l'estime que la société lui porte.
Médecin, un glissement sémantique
Le médecin généraliste était autrefois un "médecin de famille". Ce terme signifiait qu'il ne faisait pas que soigner. Il était un maillon important de l'organisation sociale de proximité, au sein de laquelle la composante humaine d'accompagnement, de partage et de soutien était primordiale.
Il adaptait ses tarifs, ne faisait pas toujours payer, recevait parfois une rémunération en nature (poulets, pommes, etc.), ajustait sa pratique aux caractéristiques de sa patientèle, à son histoire. Son exercice s'appuyait sur l'éthique et il agissait en "son âme et conscience" afin d'évaluer et de réguler sa pratique. Elle était faite d'arrangements où chacun trouvait son compte : le médecin jouissait d'une liberté d'exercice et une relation humaine avec ses patients, une disponibilité et un soutien majeur pour les patients. Il était respecté en tant qu'homme de vocation et d'attention à son prochain.
Ensuite, il est devenu un "médecin traitant". Cette évolution s'est faite avec l'essor de l'offre médicamenteuse et la réglementation administrative de celle-ci. La prescription a été mise en avant, avec son lot de règles et de contrôles, de peur de l'abus. Le médecin était le garant des prescriptions. L'auto-médication était mal vue par le ministère de la Santé. Le doute s'est installé autour de l'éthique du médecin.
Aujourd'hui, il est le "médecin référent". C'est-à-dire un maillon dans "le parcours de soin". Ce parcours de soin a fait l'objet de lois et l'objet d'une codification et d'une rémunération spécifique décidée par la CPAM avec le ministère de la Santé. L'aspect humain de son activité est absent. Son activité est dirigée par des règles statistiques et économiques. Si le médecin généraliste reçoit un patient en CMU, ou sous un autre statut social, qui ne fait pas parti du parcours de soin dont il est responsable, il sera moins payé.
Normativité et performance
Il doit chaque année remplir pour la CPAM des indicateurs afin de suivre les normes décidées et toucher une prime de "performance". Ce n'est plus son éthique, son "âme et conscience" qui sont mises en avant mais des règles administratives totalitaires qu'il doit impérativement suivre, même si elles sont dissonantes avec la réalité du terrain. Les dissonances professionnelles participent grandement à toute forme de souffrance au travail quel que soit le métier.
Les soignants n’en peuvent pu de subir les injonctions chiffrées et normatifs de la CPAM. Ils ne peuvent pas envisager de dire à des patients qu’ils ne peuvent pas leur faire d'arrêt de travail car ils ont dépassé leur quota ; qu’ils ne peuvent recevoir une famille car ils ont fait leurs 50 patients dans la journée, autorisés par la sécurité sociale.
Ils ne sont pas contre des évaluations. Ils veulent seulement que cela se fasse de façon collaborative, équitable et égalitaire. Non dans une organisation stalinienne qui font qu’ils sont plus préoccupés par le fait de suivre des textes et des injonctions qu’à soigner leurs patients.
Les médecins étaient des professionnels libres et heureux. Il semble que ce statut soit devenu insupportable pour la ministre de la Santé qui, par ces multiples lois a tenté d’humilier et de rabaisser les soignants. Ils manifestent aujourd'hui pour défendre leur savoir-faire, leur honneur et leur dignité.
http://leplus.nouvelobs.com/contribution/1628762-de-medecin-de-famille-a-medecin-referent-des-mots-qui-resument-le-mal-etre-des-soignants.html
À mauvais médecin, mauvais patient
« Il y a de mauvais
médecins, sans doute. Mais il y a toute une horde de mauvais patients
qui, malgré un début d'emphysème, continuent à fumer, qui ne font pas
d'exercice, qui mangent du fast-food, qui sont grossiers et qui mentent comme des arracheurs de dents », écrit l'auteure.
Photo Thinkstock
Hyper spécialisationet polyvalence : comment trouver le bon dosage ?
Accès rapide
> Quelles conséquences sur l’exercice ?
> Interview de Baptiste Boukebous, Président de l’Inter syndicat national des internes des hôpitaux (Isni)
> Télécharger le dossier en PDF
Sous-tendue par l’évolution technologique et le progrès médical, l’hyperspécialisation apparaît, pour beaucoup, comme nécessaire à l’amélioration des compétences professionnelles et à la prise en charge du patient. Pour d’autres, elle entraîne la perte d’une approche globale du patient, voire du métier. L’enjeu ? Cultiver l’hyperspécialisation tout en préservant la polyvalence.
Hyperspécialisation, de quoi parle-t-on ?
« L’hyperspécialisation traduit l’évolution de l’histoire de la médecine », résume le Professeur Olivier Goëau-Brissonnière, Président de la Fédération des spécialités médicales (FSM) et chirurgien vasculaire. Une vision partagée par bon nombre de professionnels de santé qui estiment qu’elle épouse le progrès médical et celui des connaissances. « De fait, nous ne pouvons en donner qu’une définition dynamique », souligne le Professeur Michel Claudon, Président de la Conférence nationale des présidents de Commission médicale d’établissement (CME) de CHU et chef du service radiologie au CHRU de Nancy.Le fruit d’une ramification continue
« C’est une évolution obligatoire qui se décline dans toutes les disciplines même les plus transversales, ajoute le Pr Claudon. Prenons l’exemple de la biologie. Aujourd’hui, on fait de l’hématologie sans faire pour autant de la bactériologie. Idem pour l’imagerie médicale qui compte dix surspécialités : génito-urinaire, neuroradiologie, imagerie pédiatrique etc. L’hyperspécialisation est un mouvement qui ne cesse de se ramifier. À tel point que l’hyperspécialiste d’aujourd’hui deviendra le spécialiste de demain. C’est un arbre dont les branches poussent en continu mais dont le tronc reste commun : la médecine ».Le poids des progrès scientifiques et techniques
A cette hyperspécialisation, plusieurs raisons. La première invoquée reste l’évolution permanente des techniques et des technologies. « L’innovation technologique – la sophistication des équipements, le développement de la robotique etc. – rend de plus en plus compliquée la seule activité généraliste. C’est une tendance de fond que l’on retrouve aujourd’hui dans bon nombre de secteurs professionnels », souligne le Dr Jean-Luc Baron, Président de la Conférence nationale des présidents de Conférence médicale d’établissement (CME) dans l’hospitalisation privée et chirurgien plasticien.« Dans ce contexte, la profession médicale est confrontée à plusieurs difficultés car elle doit maintenir ses connaissances à jour, souligne Le Pr Claudon. Connaissances qui sont de plus en plus nombreuses à acquérir. Si l’on veut s’hyperspécialiser, on est obligé, à un certain moment, d’orienter son exercice. Tout cela dépend aussi de son mode d’exercice. En CHU, nous sommes les animateurs de l’hyperspécialisation. Cela fait partie de nos missions de recours et de référence. »
Un mouvement dopé par son attractivité
Le mouvement vers l’hyperspécialisation est en outre dopé par la valorisation personnelle qu’il offre au praticien : « On se fait un nom sur une spécialisation pointue, on publie, explique le Dr Robert Nicodème, Président de la section Formation et compétences médicales au Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM). Pour un jeune chirurgien, il est toujours très attractif de faire partie d’une équipe de pointe qui affiche des résultats. Des études montrent également que l’hyperspécialisation permet une meilleure prise en charge et une meilleure reprise. »Quelles conséquences sur l’exercice ?
L’hyperspécialisation
est visiblement incontournable. Si elle a de réels avantages, attention
aux effets pervers… à avoir en tête pour en éviter les principaux
pièges.
Voie d’excellence ou chemin vicinal ?
Le Pr Claudon estime quant à lui que « l’hyperspécialisation suppose de s’y confronter avec exigence. Il faut avoir un flux de patients suffisant, faire un effort de formation et travailler en réseau. Jusqu’à présent, les contours d’une spécialité se dessinaient en fonction des organes mais peut-être que tout cela pourrait être remis en cause. Dans les années à venir, l’approche pourrait être plus transversale. »
Ne pas abandonner l’approche globale
Pour le Pr Olivier Goëau-Brissonnière, un principe doit demeurer : «
La connaissance des bases. S’il y a hyperspécialisation, c’est
uniquement parce que les professionnels de santé sont bien formés pour
savoir effectuer la majorité des actes dans leur spécialité et peuvent,
par conséquent, choisir le meilleur traitement pour le patient ». Pour
le chirurgien, il y a danger lorsque le professionnel hyperspécialisé
ne maîtrise plus vraiment qu’une seule technique et ne préconise plus
que celle-ci. C’est pourquoi «
il faut au moins développer des techniques au sein d’une équipe qui
travaille ensemble et assure une vraie polyvalence pour assurer une
approche globale ».
Attention au risque de lassitude !
« Auparavant, en chirurgie générale, on passait du ventre à un autre organe, relate le Dr Baron.
Aujourd’hui, du fait des techniques de plus en plus pointues, le risque
est de s’enfermer dans une spécialité dans laquelle on officie toute sa
vie. À mon sens, cela pose un vrai problème dans les carrières
médicales. Réaliser le même type d’opérations pendant vingt ou trente
ans, ça peut être lassant. »
Compenser par l’organisation des équipes
« Les patients se présentent rarement à l’hôpital en sachant, de manière précise, de quoi ils souffrent, rappelle le Pr Claudon. Il faut que l’on conserve une polyvalence avec des praticiens capables de faire un bon examen médical. Chaque discipline doit garder des polyvalents. C’est d’ailleurs le challenge : développer l’hyperspécialisation tout en gardant une cohérence d’ensemble. Exemple en radiologie où nous ne segmentons pas tout. Le radiologue cumule deux ou trois surspécialités. Enfin, notons qu’en CHU, nous avons la médecine interne. Une discipline jadis très présente qui l’est un peu moins aujourd’hui. » Et le Professeur d’ajouter : « Les hôpitaux doivent s’organiser pour assurer une polyvalence, avoir une ressource spécialisée et cultiver l’hyperspécialisation. Ils doivent pouvoir s’organiser en régions. Il faut accompagner et faciliter le parcours du patient. »
Même écho de la part du Pr Olivier Goëau-Brissonnière : «
L’hyperspécialisation ne doit pas générer de trou dans la couverture
médicale. Il faut une organisation du réseau de soins au niveau régional
qui permette à un patient d’être suivi par un spécialiste. »
Des nouvelles formes d’organisation à inventer
Pour le Dr Baron, l’hyperspécialisation pose problème dans tous les domaines quelque peu généralistes : « Que se passe-t-il lorsqu’il y a une urgence ? En orthopédie, par exemple. Le chirurgien hyperspécialisé de l’épaule peut-il opérer une fracture du plateau tibial ? Le fait-il encore ? Les établissements, notamment dans le privé, ont tendance à regrouper les spécialités comme l’orthopédie, l’obstétrique, la chirurgie viscérale etc. En cas d’urgence, il faut avoir les ressources. Si tout est dispatché et que les professionnels disent qu’ils ne sont pas capables d’assumer des gardes quand elles ne concernent pas leur hyperspécialité, c’est un problème. »
D’où la nécessité d’inventer de nouveaux types d’organisation, y compris en exercice libéral ! « Avec la Confédération des syndicats médicaux français, explique le Dr Baron,
nous essayons de développer des entreprises médicales en capacité de
traiter une pathologie sur un territoire donné dans le but d’allier
hyperspécialité et prise en charge globale. S’agissant de
l’organisation, il faut voir de quelle manière, nous médecins, pouvons
nous organiser une structure libérale en multiprofessionnels. » Et le chirurgien de citer l’exemple du territoire de Montpellier-Lodève où «
des professionnels de santé – chirurgiens, radiologues, infirmiers etc.
– ont constitué une association dédiée à la prise en charge du cancer
du sein et qui permet d’assister le patient dans son parcours de soins. »
« À la fin de ma formation, je serai polyvalent mais j’aurai une coloration de mon exercice »
Baptiste Boukebous, Président de l’Inter syndicat national des internes des hôpitaux (Isni), revient sur l’hyperspécialisation vue du côté des futurs praticiens.Comment envisagez-vous l’hyperspécialisation ?
Baptiste Boukebous : Tant au niveau des internes que des enseignants, nous parlons plus volontiers de coloration de l’exercice que d’hyperspécialisation. Un chirurgien orthopédique peut avoir une spécialité en chirurgie de la main. Cette coloration en chirurgie de la main ne lui interdit pas tout savoir-faire. Notre formation tend de plus en plus à aller vers cette coloration de l’exercice. C’est inéluctable ! Par définition, la médecine évolue constamment : de nouvelles maladies, de nouvelles prises en charge, de nouveaux protocoles etc. Les ramifications sont de plus en plus nombreuses. Un médecin doit avoir un enseignement adapté aux connaissances d’aujourd’hui, plus abouties et donc plus filiarisées. L’enjeu essentiel, c’est de ne pas oublier l’exercice médical de base pour pouvoir prendre en charge n’importe quelle pathologie dans sa spécialité d’origine.
La formation du troisième cycle, en cours de réforme, permet-elle de préserver cet exercice médical de base ?
B.B : Le principe de notre formation reste toujours que nous puissions toucher à tout. La réforme signe la disparition du Diplôme d’études spécialisées complémentaires (Desc). Il ne reste plus que des Diplômes d’études spécialisées (DES). Elle signe aussi la fin du DES de chirurgie générale. Désormais, nous passerons directement en orthopédie, en urologie etc. Il est vrai que la filiarisation engendre une intensification de la formation sur la spécialité qui nous conduit plus rapidement vers une discipline de notre choix.
Mais nous restons tous extrêmement vigilants quant au contenu des maquettes réalisées en ce moment par les différents collèges de spécialités en lien avec les associations d’internes pour conserver une formation de base de qualité malgré le renforcement de la coloration de l’exercice. L’apparition d’options et de formations transversales dans la réforme doit être un complément au diplôme qui permet une qualification supplémentaire. Mais ce n’est pas parce que nous choisissons une option que nous aurons une pratique exclusive. À la fin de ma formation, je serai polyvalent mais j’aurai une coloration de mon exercice. Enfin, il faut rappeler que nous ne sommes pas obligés de nous surspécialiser en internat.
Ne finirez-vous pas tous, malgré tout, hyperspécialisés ?
B. B. : Il faut raisonner d’un point de vue pragmatique ! Qui dit surspécialisation, dit compétences pour prendre en charge telle ou telle pathologie plus complexe. Et si elles sont plus complexes, elles sont plus rares. C’est un exercice plus fin et plus précis de second recours, ce qui signifie un nombre de patients limités sauf dans un centre de référence. Il faut donc pouvoir rester ouvert sur une patientèle plus large. http://www.profilmedecin.fr/contenu/hyperspecialisation-et-polyvalence-comment-trouver-le-bon-dosage/?utm_medium=Email&utm_source=ExactTarget&utm_campaign=2016_nl_profil_medecin_septembre16_desinscriptioncandidats
Chronique
Confessions d'une médecin de famille
Médecin indigne!
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Dre Anonyme
1. J'ai l'esprit étroit
Dans le temps, il y avait UNE façon de faire de la médecine. On étudiait la théorie dans les livres et on appliquait nos connaissances sur nos patients. Maintenant, pour résoudre un problème médical, les patients vont demander différents traitements avec des pierres précieuses, de l'homéopathie, des colliers de bois de noisetier, et j'en passe. Je n'y crois pas et mon esprit scientifique est pas mal rigide.Ce qui est difficile, c'est que je dois me garder à jour avec ces nouvelles absurdités, et en savoir assez pour informer mes patients pour qu'ils ne sentent pas que je suis aussi fermée. Je m'efforce à garder l'esprit ouvert, parce que si ces traitements «fonctionnent» chez un patient, ça m'évitera des consultations inutiles. J'ai aussi beaucoup de difficulté à tolérer certains patients: les victimes de la vie, les manipulateurs, les «chialeux». Je les vois quand même, mais ce sont des fardeaux.
2. Je suis une excellente comédienne
Rassurez-vous, j'ai bel et bien fait ma médecine et j'ai mon permis. Ce que je veux dire par ça, c'est que je joue parfois la comédie au bénéfice d'une meilleure relation patient-médecin. Les détails de ton divorce qui t'ont poussé au burn-out? Je suis fatiguée et je vais patiemment te laisser parler, mais je ne vais rien entendre. Ton enfant hurle et se débat quand il me voit? «Oui, oui, c'est le plus bel enfant que j'ai vu, tes enfants sont des anges.» Certains seront déçus que je ne sois pas vraiment une vraie Mère Teresa, mais c'est surtout pour garder ma santé mentale que je fais semblant d'être aussi agréable et gentille.3. Je suis paranoïaque
Un médecin des temps modernes sera toujours paranoïaque. Je n'ai pas nécessairement peur de faire une erreur médicale, mais ultimement peur de me faire poursuivre, peur d'avoir une plainte. Ce n'est pas une question de compétence: n'importe qui peut faire une plainte sur moi, sur n'importe quoi. Que ce soit mon habillement, mes jokes plates, ou ma façon de parler, toutes les plaintes, aussi ridicules qu'elles soient, feront perdre du temps à pas mal de monde.4. Je fais de la médecine rapide («fast food»)
Dans un monde idéal, je traiterais tous mes patients avec de la médecine lente. Diabète? Changement de diète et exercices. Crise de panique? Psychothérapie. Mais dans le système de santé actuel, ce n'est pas possible. La médecine doit être rapide, mon gouvernement chronomètre mes consultations à la minute près, mes patients s'attendent à avoir des résultats rapides sans changement de leurs habitudes. Malgré le fait que je sais que les médicaments ne feront que repousser le problème, je traite rapidement, avec des prescriptions.5. Je suis pessimiste
Quand je regarde comment les choses fonctionnent au Québec en ce moment, que ce soit en santé, en politique ou ailleurs, comme on ne pense pas à long terme, comme on se complait au statu quo, je suis pessimiste. J'ai beau essayer de ne pas l'être devant mes patients (cf. mes habiletés de «fakeuse», au point 2), je pense quand même que si l'on continue sur le même chemin, on se dirige vers un crash imminent.Pour questions et commentaires, écrivez à dreanonyme@gmail.com.
"Médecin de campagne" : un film qui rend hommage à la médecine rurale
Après le succès d'Hippocrate, Thomas Lilti revient au cinéma avec Médecin de campagne, un film plein d'humanité et de réalisme sur la médecine de famille. Le duo François Cluzet - Marianne Denicourt livre un portrait touchant du métier de médecin dans un petit village de France.
Mis à jour le , publié le
Très vite pourtant, ce médecin dévoué tombe malade, il est atteint d'un cancer. Malgré son traitement par chimiothérapie, il refusera catégoriquement de s'arrêter de travailler. La question de la transmission de son savoir et de sa succession se pose donc dès le début du film. C'est Marianne Denincourt, une ancienne infirmière, devenue médecin sur le tard, qui reprendra le flambeau.
Un film réaliste sur la médecine rurale
Après l'univers de l'hôpital, le réalisateur d'Hippocrate rend hommage à la médecine de campagne. "Je voulais parler de médecine en milieu rural, de la médecine de campagne, dans un désert médical, en suivant la trajectoire d'un médecin de famille. C'est quelque chose que j’ai connu en faisant des remplacements, que j’ai vu un peu de loin, que j’ai pu observer", explique le réalisateur lors de l'avant-première.Présenté à un grand nombre de professionnels du secteur médical, le film a été accueilli avec enthousiasme. Pari réussi pour le réalisateur qui appréhendait ce moment de confrontation.
Le film rend compte de la réalité des déserts médicaux, de la difficulté à travailler en milieu rural et de la solitude du métier. "Il faut empêcher les déserts médicaux de gagner du terrain et tout mettre en œuvre pour que ces médecins ne disparaissent pas. C’est, pour moi, un enjeu social majeur et j’ai choisi de porter cette problématique au coeur du film", affirme le cinéaste. La problématique de la fin de vie a aussi (encore une fois) une place très importante dans le cinéma de Lilti.
Une dimension sociale et politique
Même si le but du film n'est pas d'apporter des solutions pour éradiquer les déserts médicaux en France, l'auteur utilise la fiction pour semer des éléments de réponse... "Il y avait chez moi un sentiment d’urgence quant à la nécessité de pointer les « carences » du service public tel qu’il va, mais en gardant toujours le désir de raconter une histoire (…), explique le réalisateur. Sans doute y a-t-il aussi la volonté de revivifier cette dimension politique et sociale, propre aux films des années 1970/80, qui aujourd’hui me semble faire défaut au cinéma populaire français.Les maisons de santé apparaissent dans le film comme une méthode très peu satisfaisante qui donne souvent lieu à des spéculations financières. De plus, elles ne résolvent pas l'épineux problème du manque de motivation des médecins pour s'installer en milieu rural.
Selon Thomas Lilti, "l'incitation à la médecine généraliste se fera d'abord à l'université". Il faut plus de porosité entre le secteur libéral et l'hôpital. C'est une aberration de former des jeunes médecins généralistes uniquement à l'hôpital", indique-t-il. Ajoutant que les internes devraient intégrer, pendant leur formation, des cabinets libéraux, en ville comme à la campagne. Car les déserts médicaux ne sont pas circonscrits à la campagne, ils concernent aussi les zones périurbaines et même les villes.
Médecin De Campagne - Date de sortie en salle : le 23 mars 2016
Médecin De Campagne Bande-annonce VF
Thierry Carrel
Du cœur à l’ouvrage
Scolarisé chez les Jésuites,
le chirurgien Fribourgois Thierry Carrel vise une médecine ouverte et
formatrice. Un excès de poids l’a poussé questionner sa santé et
remonter sur un vélo
Au printemps passé, le
patron de la chirurgie cardiovasculaire bernoise – 400 employés,
90 millions de budget – s’est décidé à agir pour sa propre santé. A 102
kilos, il est allé consulter une nutritionniste «en ville», qui lui a
concocté un programme minceur de 25 semaines. Le professeur a opté pour
le vélo. Ses deux virées hebdomadaires de Berne à Thun le long de
l’Aaretal et du Gürbetal ont ramené sa silhouette à 75 kilos. «C’était
une question de cohérence face aux patients», confie-t-il, avec un
accent fribourgeois. «Je rêve en allemand, je travaille en Bernois»,
précise l’homme, dont la femme, Sabine Dahinden, animatrice à l’émission
de TV «Schweiz aktuell», vient d’Uri.
A l’hôpital universitaire de l’Ile, le chirurgien en chef participe jusqu’à une quinzaine d’interventions cardiaques par semaine. A 55 ans, il estime avoir vu passer sous son scalpel ou son contrôle plus de 10 000 patients. Thierry Carrel, qui est connu comme le loup blanc en Suisse alémanique, est sur la brèche. «En octobre, je suis allé opérer au Japon, à mon retour, mon emploi du temps était plein à craquer», raconte cet amoureux de la philosophie et du trombone, qui s’est aussi engagé dans l’humanitaire, opérant par exemple des enfants à Perm (Russie) avec des membres de la Clinique de chirurgie cardiovasculaire de l’Hôpital de l’Ile.
Nommé Docteur honoris causa de l’Université de Fribourg en novembre, l’homme est un bourreau de travail, mais il vise l’économie. «Je ne ferme pas tout, je délègue», dit-il, parlant des opérations, où il intervient aux moments clefs. Cette posture, qui n’est pas celle de tous ses homologues, lui permet de lâcher la bride à ses médecins assistants. Donc à les former. Le boss nous montre un questionnaire comparatif mené en 2015 par l’École polytechnique fédérale de Zurich, qui indique une note de satisfaction de 5.3 attribuée à son service par ses médecins en formation, pour une moyenne générale de 3.6 points sur la cohorte globale. «Et en Suisse romande, on est en dessous», estime le professeur, qui a soupçonné le CHUV de placer plus rapidement les malades sur la liste d’attente pour augmenter leurs chances de bénéficier d’une transplantation cardiaque. En 2013, leur nombre s’est élevé à 32, dont 11 au CHUV, selon l’Office fédéral de la santé publique. Le ratio de ces opérations en Suisse romande est donc plus élevé par rapport à la population, insiste cet immigré en terres alémaniques.
D’où lui vient ce goût de la confrontation? Peut-être des Jésuites, analyse cet ancien écolier du Collège Saint-Michel, qui a usé ses culottes dans cet établissement durant les années 1970. Il raconte les processions de la Fête-Dieu, avec 50 prêtres et 1500 collégiens, la fanfare, plus les jeunes filles du Collège Sainte-Croix. Une partie des enseignants étaient donc des Jésuites, «les plus ouverts des catholiques», dit-il. Le programme du collège inclut 5 heures de philosophie par semaine deux années durant. Des cours de sciences religieuses sont donnés durant toute la scolarité. Les élèves y comparent le bouddhisme, l’Islam, le christianisme. «Les Jésuites étaient médecins, physiciens, très ouverts. On disait de Fribourg que c’était l’enfer catholique. Je dirais plutôt que c’était son paradis. Car on vit plus gaiment chez les catholiques, où la place du péché est grande, mais où il y a ensuite l’absolution», se réjouit Thierry Carrel.
Le Fribourgeois s’engage dans la chirurgie cardiovasculaire au milieu des années 1980. La transplantation cardiaque, qui avait connu un creux dans les années 1970 en raison d’échecs liés aux «rejets», redémarre. Il cite Barnard, le Sud-Africain, qui réussit la première transplantation cardiaque en 1967. Puis le Neuchâtelois Jean-François Borel qui découvre (pour Sulzer) la ciclosporine dans un champignon trouvé en Norvège. Cet agent permet de juguler le rejet d’un organe étranger par le corps. Carrel loue Ake Senning, chef du Département de chirurgie à Zurich, qui exécutera la première greffe de cœur en Suisse en 1969. Le Suédois formera le Croate Marko Turina, premier patron de la chirurgie cardiaque à Zurich. «Turina était l’autorité en Suisse. Il innovait, il investiguait, il avait une intuition extraordinaire. Les premiers mois, les médecins assistants suivaient chaque opération avec lui. On ouvrait et on refermait (les patients: nldr) et nous dictions les rapports opératoires. Il faisait tout: les nouveaux nés, les enfants, les opérations de malformations congénitales complexes. Après six mois de formation, on se retrouvait jeté dans le bain, à opérer seul avec un assistant. Il était très autoritaire, mais on avait été éduqués comme ça et je n’en ai pas souffert.»
A Zurich, Thierry Carrel espère garder son protégé près de lui et lui propose de remplacer – quand il partira – Ludwig Karl von Segesser. Le Lucernois est le prédécesseur de l’actuel chef de clinique de chirurgie cardiovasculaire du CHUV, René Prêtre. Privat Docent en poche, le Fribourgeois choisit en fait de s’envoler pour Hanovre, «Mecque de la transplantation du cœur et du poumon», quitte à froisser son patron. Carrel se perfectionne en Finlande et plus tard aux Etats-Unis. A Paris, il travaille avec le chirurgien Claude Planché. «A midi, il m’invitait dans son bureau et me demandait; alors, qu’est-ce qu’on va faire cette après-midi? Un soin palliatif, ou une grande correction? Il parlait comme un livre», se remémore le Suisse. Le médecin débarque à Berne en 1996, avant se voir offrir un poste chef de clinique à Erlangen-Nuremberg. Mais à l’hôpital de l’Ile, le patron de la chirurgie cardiovasculaire, Ulrich Althaus, annonce que dans ces conditions, il quittera son poste deux ans avant sa retraite. «Il a eu beaucoup de grandeur», commente l’actuel boss, assis 17 ans plus tard dans le même bureau, au niveau C du «Inselspital».
Passer le flambeau, transmettre son savoir: voilà l’un des ressorts de ce médecin avenant, fils d’un simple apprenti de commerce devenu trésorier général du canton de Fribourg, «juste en dessous des Conseillers d’Etat», brosse-t-il. Ainsi Thierry Carrel a-t-il participé à la commission de sélection du prochain chef de la clinique de chirurgie cardiovasculaire des HUG. L’opération vise à remplacer Afksendiyos Kalangos, qui a claqué la porte avec fracas au printemps 2015, sur fond de mésentente avec René Prêtre. Le choix pourrait se porter sur un poulain de l’écurie bernoise, murmure-t-on dans la ville confédérale. Ce serait alors un peu de l’esprit de Carrel qui volerait au secours de ce service, dans la ville où son grand-père avait vécu, comme tenancier d’un bistro. Réponse début janvier.
1994: Termine sa formation postgraduée en chirurgie cardio-vasculaire à Zurich
2008: Opère le conseiller fédéral Hans-Rudolf Merz
1999: Dirige la clinique universitaire de chirurgie cardio-vasculaire de l’Hôpital de l’Ile
http://www.letemps.ch/societe/2015/12/21/coeur-ouvrage
A l’hôpital universitaire de l’Ile, le chirurgien en chef participe jusqu’à une quinzaine d’interventions cardiaques par semaine. A 55 ans, il estime avoir vu passer sous son scalpel ou son contrôle plus de 10 000 patients. Thierry Carrel, qui est connu comme le loup blanc en Suisse alémanique, est sur la brèche. «En octobre, je suis allé opérer au Japon, à mon retour, mon emploi du temps était plein à craquer», raconte cet amoureux de la philosophie et du trombone, qui s’est aussi engagé dans l’humanitaire, opérant par exemple des enfants à Perm (Russie) avec des membres de la Clinique de chirurgie cardiovasculaire de l’Hôpital de l’Ile.
Nommé Docteur honoris causa de l’Université de Fribourg en novembre, l’homme est un bourreau de travail, mais il vise l’économie. «Je ne ferme pas tout, je délègue», dit-il, parlant des opérations, où il intervient aux moments clefs. Cette posture, qui n’est pas celle de tous ses homologues, lui permet de lâcher la bride à ses médecins assistants. Donc à les former. Le boss nous montre un questionnaire comparatif mené en 2015 par l’École polytechnique fédérale de Zurich, qui indique une note de satisfaction de 5.3 attribuée à son service par ses médecins en formation, pour une moyenne générale de 3.6 points sur la cohorte globale. «Et en Suisse romande, on est en dessous», estime le professeur, qui a soupçonné le CHUV de placer plus rapidement les malades sur la liste d’attente pour augmenter leurs chances de bénéficier d’une transplantation cardiaque. En 2013, leur nombre s’est élevé à 32, dont 11 au CHUV, selon l’Office fédéral de la santé publique. Le ratio de ces opérations en Suisse romande est donc plus élevé par rapport à la population, insiste cet immigré en terres alémaniques.
D’où lui vient ce goût de la confrontation? Peut-être des Jésuites, analyse cet ancien écolier du Collège Saint-Michel, qui a usé ses culottes dans cet établissement durant les années 1970. Il raconte les processions de la Fête-Dieu, avec 50 prêtres et 1500 collégiens, la fanfare, plus les jeunes filles du Collège Sainte-Croix. Une partie des enseignants étaient donc des Jésuites, «les plus ouverts des catholiques», dit-il. Le programme du collège inclut 5 heures de philosophie par semaine deux années durant. Des cours de sciences religieuses sont donnés durant toute la scolarité. Les élèves y comparent le bouddhisme, l’Islam, le christianisme. «Les Jésuites étaient médecins, physiciens, très ouverts. On disait de Fribourg que c’était l’enfer catholique. Je dirais plutôt que c’était son paradis. Car on vit plus gaiment chez les catholiques, où la place du péché est grande, mais où il y a ensuite l’absolution», se réjouit Thierry Carrel.
Le Fribourgeois s’engage dans la chirurgie cardiovasculaire au milieu des années 1980. La transplantation cardiaque, qui avait connu un creux dans les années 1970 en raison d’échecs liés aux «rejets», redémarre. Il cite Barnard, le Sud-Africain, qui réussit la première transplantation cardiaque en 1967. Puis le Neuchâtelois Jean-François Borel qui découvre (pour Sulzer) la ciclosporine dans un champignon trouvé en Norvège. Cet agent permet de juguler le rejet d’un organe étranger par le corps. Carrel loue Ake Senning, chef du Département de chirurgie à Zurich, qui exécutera la première greffe de cœur en Suisse en 1969. Le Suédois formera le Croate Marko Turina, premier patron de la chirurgie cardiaque à Zurich. «Turina était l’autorité en Suisse. Il innovait, il investiguait, il avait une intuition extraordinaire. Les premiers mois, les médecins assistants suivaient chaque opération avec lui. On ouvrait et on refermait (les patients: nldr) et nous dictions les rapports opératoires. Il faisait tout: les nouveaux nés, les enfants, les opérations de malformations congénitales complexes. Après six mois de formation, on se retrouvait jeté dans le bain, à opérer seul avec un assistant. Il était très autoritaire, mais on avait été éduqués comme ça et je n’en ai pas souffert.»
A Zurich, Thierry Carrel espère garder son protégé près de lui et lui propose de remplacer – quand il partira – Ludwig Karl von Segesser. Le Lucernois est le prédécesseur de l’actuel chef de clinique de chirurgie cardiovasculaire du CHUV, René Prêtre. Privat Docent en poche, le Fribourgeois choisit en fait de s’envoler pour Hanovre, «Mecque de la transplantation du cœur et du poumon», quitte à froisser son patron. Carrel se perfectionne en Finlande et plus tard aux Etats-Unis. A Paris, il travaille avec le chirurgien Claude Planché. «A midi, il m’invitait dans son bureau et me demandait; alors, qu’est-ce qu’on va faire cette après-midi? Un soin palliatif, ou une grande correction? Il parlait comme un livre», se remémore le Suisse. Le médecin débarque à Berne en 1996, avant se voir offrir un poste chef de clinique à Erlangen-Nuremberg. Mais à l’hôpital de l’Ile, le patron de la chirurgie cardiovasculaire, Ulrich Althaus, annonce que dans ces conditions, il quittera son poste deux ans avant sa retraite. «Il a eu beaucoup de grandeur», commente l’actuel boss, assis 17 ans plus tard dans le même bureau, au niveau C du «Inselspital».
Passer le flambeau, transmettre son savoir: voilà l’un des ressorts de ce médecin avenant, fils d’un simple apprenti de commerce devenu trésorier général du canton de Fribourg, «juste en dessous des Conseillers d’Etat», brosse-t-il. Ainsi Thierry Carrel a-t-il participé à la commission de sélection du prochain chef de la clinique de chirurgie cardiovasculaire des HUG. L’opération vise à remplacer Afksendiyos Kalangos, qui a claqué la porte avec fracas au printemps 2015, sur fond de mésentente avec René Prêtre. Le choix pourrait se porter sur un poulain de l’écurie bernoise, murmure-t-on dans la ville confédérale. Ce serait alors un peu de l’esprit de Carrel qui volerait au secours de ce service, dans la ville où son grand-père avait vécu, comme tenancier d’un bistro. Réponse début janvier.
Mini-Bio:
1960: Naissance à Fribourg1994: Termine sa formation postgraduée en chirurgie cardio-vasculaire à Zurich
2008: Opère le conseiller fédéral Hans-Rudolf Merz
1999: Dirige la clinique universitaire de chirurgie cardio-vasculaire de l’Hôpital de l’Ile
http://www.letemps.ch/societe/2015/12/21/coeur-ouvrage
Encore les maudits médecins !
« À quoi bon examiner la
part de responsabilités de chacun dans notre société en matière de santé
afin d'expliquer pourquoi le système ne suffit plus à la demande ? » se
questionne, résignée, Carol Patch-Neveu.
PHOTO FRANÇOIS ROY, ARCHIVES LA PRESSE
Société
Les quincados, génération pathétique?
Avec près d'un demi-million de
visites, notre reportage à la rencontre des «quincados», ces
quinquagénaires qui vivent comme des trentenaires, est l'article le plus
lu en 2015 sur notre site.
Ils ont entre 45 et 55 ans, mais vivent comme des jeunes de 30 ans. Et ils ont peut-être raison
C’est un soulagement. La levée d’une certaine culpabilité. Vous avez entre 45 et 55 ans, parfois de grands enfants, mais, des habits au langage, en passant par les loisirs, les sports et les voyages, vous continuez à vous comporter comme un jeune de 30 ans. Vous vous trouvez pathétique, on dit de vous que vous êtes un éternel adolescent? Vous avez vu le film While We’re Young et vous vous êtes reconnu? Vous avez tort de vous flageller, car, pour la première fois dans l’histoire de l’humanité, l’âge a rajeuni, dit le sociologue Serge Guérin, et le regard social doit évoluer. On a bien envie de l’écouter.
Le quincado. Non, ce n’est pas un nouveau jeu de la Loterie Romande. C’est une appellation née en 2013 définissant cette population d’un bon niveau socioculturel qui vit son âge senior (depuis ses 50 ans) avec un élan déconcertant. Etonnamment, ce terme est plutôt appliqué aux femmes. Sans doute parce que les hommes ont, depuis longtemps, leur midlife crisis où ils s’inventent une nouvelle vie. Le quincado, donc, est un baby-boomer qui a grandi dans les années 60, 70 et qui préfère la liberté à l’autorité, les sorties aux corvées, le travail choisi à la besogne subie, les voyages improvisés aux vacances programmées. Rien n’est arrêté, tout est à créer. Les spécimens féminins sont proches de leurs filles adultes avec qui elles partagent t-shirts et, parfois, petits copains. Les prototypes masculins aiment les jeux vidéo, le sport à haute dose et les soirées qui durent jusqu’au petit matin. Tous deux sont plutôt des accros des réseaux sociaux. Fin de la liste, car, précisément, un quincado ne veut pas se laisser enfermer. Sa vie, il la façonne au jour le jour et rejette toutes les étiquettes…
Lire aussi: Mère et femme au travail: y a-t-il encore des superwomans?
Mylène a 55 ans, mais en paraît dix de moins. Depuis quatre ans, cette Parisienne, ex-directrice d’une agence de publicité, tient un blog, Happyquinqua.com, et a toutes les caractéristiques de ce nouveau label. «Si je suis une quincado? Je trouve le terme un peu barbare, mais je me reconnais bien dans la définition. Depuis que j’ai vendu ma boîte de pub, je fuis tout ce qui peut me stresser et, oui, ma vie ressemble assez à un conte de fées», sourit-elle au téléphone. Jogging régulier dans les parcs parisiens, voyages fréquents à New York à travers un échange d’appartement, consulting pour jeunes entreprises, cafés avec les copines, sorties culturelles, lecture et écriture, Mylène affiche de fait un quotidien libéré. Comment réagit son entourage à cette existence fluide? «Mon ami, qui a mon âge, est un créatif. Il s’accommode très bien de ce fonctionnement.
«Hier soir, on a jamé tous les trois, mon ami au piano, mon fils à la guitare et moi au chant»
Idem pour mes enfants. Que ce soit mon fils de 27 ans ou ma fille de 22 ans qui vit à New York, les deux semblent contents d’avoir une maman dynamique et libre de ses mouvements. Encore hier soir, on a «jamé» tous les trois, mon ami au piano, mon fils à la guitare et moi au chant, et on a passé un magnifique moment. Enfin, pour mes parents, je ne vis pas dans la même ville qu’eux, mais je vais les voir une fois par mois et ils sont solidaires de mes choix. Même assez fiers, je crois.»
Que Mylène se sente jeune, c’est un fait et, visiblement, un fait réjouissant. Mais souhaite-t-elle aussi «paraître» jeune? Autrement dit, a-t-elle recours à la chirurgie esthétique pour atténuer les effets du vieillissement? «Déjà, je me suis toujours protégée du soleil, mais depuis cinq ans, je fais des injections de botox, de manière très modérée, une fois tous les deux ans, répond l’intéressée. Mon esthéticien m’applique aussi des masques et un traitement à la lumière pulsée. Je suis contre la chirurgie esthétique, car elle trahit ce qu’on est. Mais je ne pourrais pas ne rien faire dans mon milieu où toutes mes amies agissent en douceur contre les ravages de l’âge!»
Lire aussi: Un enfant? Non merci. Enquête sur ces couples qui ont fait le choix de ne pas devenir parents
La question de l’intervention sur son propre corps semble superficielle et pourtant, elle est cruciale. Serge Guérin, sociologue, précise la nuance: «Les quincados ne sont pas le reflet d’un refus de vieillir, ils sont les bénéficiaires d’un rajeunissement objectif. Il y a encore quinze ans, un quinquagénaire qui se faisait licencier était un homme fini. Aujourd’hui, un quinquagénaire qui se fait licencier entame une nouvelle vie, car il sait que son existence peut encore durer quarante à cinquante ans.» Les personnes qui recourent à la chirurgie esthétique se situent dans un tout autre processus, sanctionne le sociologue. «Elles ne s’assument pas, s’éloignent d’elles-mêmes, se nient, et ça, c’est problématique.»
«Je suis en effet un grand gosse»
Sinon, le spécialiste est formel. Auteur de Silver Génération, un ouvrage qui lutte efficacement contre dix idées reçues concernant le vieillissement, troisième et quatrième âge compris, Serge Guérin affirme que «l’âge a rajeuni». Il distingue trois mutations à l’origine de cette évolution. «Il n’y a jamais eu autant de gens en activité à 50 ans. Ensuite, c’est la première fois dans l’histoire que cet âge correspond à la moitié de la vie. Enfin, c’est aussi la première fois que les gens arrivent à 50 ans dans une telle forme, que ce soit sur les plans physique ou neurologique.»
Une juvénilité dont témoigne Sébastien, qui, à 48 ans, se prépare à un avenir de quincado flamboyant. «Je suis en effet un grand gosse. J’adore flâner dans les rayons de jouets ou passer des soirées sur les jeux vidéo. J’aime aussi prendre une fausse voix au téléphone et faire marcher mon interlocuteur. Et encore ceci: je fréquente pas mal de gens qui ont facilement dix ans de moins. D’où un langage assez jeune avec des blagues franchement limites qui choquent mes deux enfants, pourtant adultes.»
Evidemment, ce constat de juvénilité décontractée concerne moins «les personnes qui travaillent sur un chantier», admet le sociologue, mais «la société doit évoluer et réaliser qu’à 50 ans aujourd’hui, on est moins vieux qu’il y a encore quinze ans».
Qu’en est-il des enfants? Comment ces jeunes de 20 à 30 ans trouvent-ils leur place dans cette nouvelle société saturée de vieux rayonnants? «Je suis contre l’idée de guerre des générations, poursuit Serge Guérin. Aujourd’hui, le savoir est transversal. Il n’est pas rare qu’un adulte âgé demande à un jeune de lui expliquer quelque chose, notamment sur le plan technologique. Chacun a donc sa légitimité.»
Et l’autorité? Mylène l’avoue volontiers: dans l’éducation de ses enfants, elle a toujours privilégié «l’amour et l’autonomie» avec, concède-t-elle joliment, des «résultats relatifs». «Là, on touche à un point sensible», reconnaît Serge Guérin. «Issus des années post-68 où il était interdit d’interdire, les quinquas pratiquent souvent un rapport copain-copain avec leurs enfants. Ce qui provoque certaines dérives en matière de hiérarchie, c’est vrai.» L’antidote? «Repenser la transmission. Je suis contre la relation autoritaire, mais je suis pour la relation d’autorité. C’est-à-dire une relation dans laquelle le quinquagénaire connaît sa valeur et transmet son expérience aux générations d’après.» Le quincado? Loin, très loin d’un individu infantile et décérébré.
Silver Génération, Serge Guérin, Ed. Michalon, Paris, 2015.
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Marie-Pierre Genecand
http://www.letemps.ch/societe/2015/08/26/quincados-generation-pathetique
Des médecins quittent le système de santé public
Tandis que bon nombre de salles d'attente dans les cliniques publiques sont bondées, celle de la clinique privée MD-Plus de Terrebonne présente un portrait fort différent. Les malades qui s'y présentent n'ont pas à patienter longtemps.
Dans cette clinique, fondée par un médecin de famille en 2004, un patient est vu 1h30 à peine après avoir pris rendez-vous pour une blessure à un pied. Quelques minutes plus tard, il passe une radiographie avant de retourner chez lui.
Depuis 2004, environ 44 000 visites ont été enregistrées dans les trois cliniques MD-Plus. Les patients doivent payer 60 $ pour devenir membres. «Ici, la visite d'urgence est de 95 $», a précisé le Dr Alain Chamoun, directeur médical de la clinique MD-Plus.
Diane Racicot, une patiente qui n'est pourtant pas fortunée, visite le privé pour la toute première fois. Elle n'arrivait jamais à voir son médecin de famille et en cherchait un autre désespérément. «Ça va faire cinq ans, ça suffit», a dit Mme Racicot.
Le Dr Michel Doyon a quitté récemment le système public, dans lequel il a œuvré pendant plus de 29 ans. Il a répondu à l'invitation de cette clinique privée, qui compte neuf omnipraticiens et deux dermatologues. Pour sa journée de travail mardi, il voit environ 16 patients.
«Je dois dire que depuis novembre dernier, on a quand même cinq nouveaux médecins qui se sont joints à l'équipe», a souligné le Dr Chamoun.
En 2013, 186 médecins de famille et 77 spécialistes pratiquaient au privé. Ce nombre a augmenté pour atteindre 235 omnipraticiens et 83 spécialistes, deux ans plus tard.
Selon le Dr Doyon, ce changement n'a rien à voir avec l'appât du gain. «Je dirais même qu'à date, j'ai même une baisse de revenu de 20 %», a-t-il dit. Il suivait 500 patients au public, mais la mise en place de la réforme Barrette l'aurait obligé à en avoir 1500 avec un surplus de bureaucratie.
«Est-ce qu'il y a de la place pour 2000 médecins privés au Québec? Pas dans la structure actuelle», croit le Dr Alain Chamoun.
Les deux médecins considèrent que le système de santé public du Québec doit rester fort, mais que le secteur privé doit avoir sa place pour répondre à la demande. «D'ailleurs, c'est ce qu'ils font dans plusieurs pays, souligné le Dr Doyon. Ils ont amalgamé le privé et le public.»
Aussi sur Canoe.ca:
Google commence à jouer au médecin | geekoGoogle commence à jouer au médecin
Par Laurent Redondo Sanchez posté il y a 18 heures
recherche du géant informatique délivre ses conseils lorsqu’une requête
vis-à-vis d’une maladie est détectée.
Jusqu’à présent, le « Knowledge Graph » de Google affichait
quelques détails définitionnels lorsqu’un internaute s’interrogeait, par
exemple, sur la nature d’un rhume. Désormais, des méthodes de
diagnostic imagées, des informations claires sur l’éventuel danger ainsi
que sur le degré de contagiosité mais également des pistes curatives
seront livrées lors d’une recherche purement sanitaire.
L’entreprise souligne qu’il sera toujours rappelé de faire appel à un
médecin capable de confirmer la présence de la maladie et d’appliquer
la médication adéquate ou d’envoyer le patient aux urgences le cas
échéant.
Google estime légitime de développer ce type de fonction par une
statistique simple et relativement inquiétante: une recherche sur vingt
concerne la santé. Au lieu de laisser la place à des escrocs, une équipe
de docteurs a été conviée à compiler, purifier et revoir l’information
afin de la placer au dessus des premiers résultats de la requête,
empêchant les malfaiteurs d’opérer. La base de données évoluera en
permanence et devrait être rapidement traduite pour être accessible dans
le monde et notamment dans les zones fragiles.
Si le médecin de famille reste évidemment le référent impératif en
matière de santé, cette nouveauté peut inviter bon nombre de citoyens à
s’intéresser à ce domaine et à apprendre des éléments basiques qui
pourraient, in fine, simplifier le parcours en cas de véritable maladie.
Soigner, c’est aussi discuter
Lorsque nous entendons parler de médecine, c’est la plupart du temps de ses coûts qu’il est question. Les augmentations des primes de l’assurance maladie, le tarif du point Tarmed, les coûts des opérations superflues, les médicaments aux prix démesurés, les équipements techniques difficiles à rentabiliser... A croire que la médecine est avant tout une question d’arithmétique.
Il n’y a pas si longtemps pourtant, les médecins étaient davantage considérés comme des savants utiles que des facteurs de coûts. La blouse blanche symbolisait la connaissance et l’expertise face à l’ignorance supposée du patient. Depuis, la technologie, et principalement l’internet, se sont développés et ont engendré de profondes mutations. Aujourd’hui, la plupart d’entre nous se renseignent sur internet avant de se rendre chez le toubib.
C’est alors fort d’un ensemble de connaissances glanées ci et là que l’on arrive en consultation. Le rôle du médecin n’est plus de poser un diagnostic, mais de confirmer ou infirmer ce que l’on soupçonne déjà. Il n’informe plus, mais explique, complète, vulgarise. Un rôle qui demande des adaptations dans la relation patient-médecin et du temps, mais qui s’accommode aussi très mal de la financiarisation de la discipline.
Comment accorder de la place à la discussion alors que seuls les actes sont valorisés? La relation avec les patients est restée figée dans un rôle uniquement social. Un décalage qui pousse à la situation absurde que plus un médecin s’investit avec ses patients, moins il est considéré comme efficace et donc utile par le système. On comprend dès lors très bien le désamour pour la médecine générale au profit de spécialisations dont l’utilité est moins remise en cause.
Appel de la ministre de la santé à soutenir la candidature de Thérèse N`Dri-Yoman au poste de Directeur Régional OMS Afrique - Abidjan.net Vidéo
Appel de la ministre de la santé à soutenir la candidature de Thérèse N`Dri-Yoman au poste de Directeur Régional OMS Afrique - Abidjan.net Vidéo
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