OPINION
Le gouvernement Trump sanctionne la Californie sur le remboursement de l'avortement
Publié le - Mis à jour le
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Le gouvernement du président Donald Trump a annoncé mercredi qu'il allait sanctionner financièrement la Californie, à hauteur de 200 millions de dollars, parce que cet Etat démocrate oblige les assurances santé à couvrir le coût des interruptions volontaires de grossesse, ce qui enfreindrait la loi fédérale selon lui.
Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a réagi en dénonçant un "acte politique mesquin". "La santé des femmes, c'est la santé publique", a-t-il déclaré dans un communiqué.
Le sujet de l'avortement est extrêmement clivant aux Etats-Unis et Donald Trump, qui doit quitter la Maison Blanche le 20 janvier prochain, avait courtisé la droite religieuse en promettant notamment de nommer des juges opposés à l'IVG.
De son côté, la Californie, bastion démocrate et fer de lance de l'opposition à la politique du milliardaire conservateur, a adopté en 2014 une législation contraignant les employeurs et les assurances privées à inclure dans leur couverture santé le remboursement des IVG.
Le gouvernement Trump avait estimé en début d'année que cette disposition allait à l'encontre d'une loi fédérale sur la liberté de conscience qui interdirait toute discrimination contre les assureurs qui refusent de couvrir les avortements.
Le ministère de la Santé a annoncé mercredi dans un communiqué que, faute de s'être mises en conformité, les autorités californiennes allaient être privées de 200 millions de dollars, retenus sur le financement fédéral destiné à la couverture santé des plus pauvres au titre du premier trimestre 2021.
"Les entités qui reçoivent des fonds (du ministère de la Santé) devraient y réfléchir à deux fois avant d'enfreindre la loi fédérale", écrit dans un communiqué Roger Severino, directeur du bureau des droits civiques de ce ministère.
"Quoi qu'on pense de la légalité de l'avortement, personne ne devrait être puni pour refuser de payer ou de contribuer pour le retrait d'une vie humaine", affirme-t-il.
Le ministère de la Santé précise que 200 millions de dollars seront retenus chaque trimestre sur les fonds destinés à la Californie tant que la législation n'aura pas été amendée.
Cette décision a toutefois peu de chances d'être suivie d'effets, le président élu, Joe Biden, ayant toute latitude pour l'annuler une fois entré en fonctions.
Ironie de l'histoire, c'est l'actuel procureur général de Californie, Xavier Becerra, que M. Biden a choisi pour devenir son ministre de la Santé.
Selon un sondage du centre de recherches Pew datant de 2018, 58% des Américains estiment que l'avortement devrait être légal mais 37% souhaitent son interdiction.
Le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a réagi en dénonçant un "acte politique mesquin". "La santé des femmes, c'est la santé publique", a-t-il déclaré dans un communiqué.
Le sujet de l'avortement est extrêmement clivant aux Etats-Unis et Donald Trump, qui doit quitter la Maison Blanche le 20 janvier prochain, avait courtisé la droite religieuse en promettant notamment de nommer des juges opposés à l'IVG.
De son côté, la Californie, bastion démocrate et fer de lance de l'opposition à la politique du milliardaire conservateur, a adopté en 2014 une législation contraignant les employeurs et les assurances privées à inclure dans leur couverture santé le remboursement des IVG.
Le gouvernement Trump avait estimé en début d'année que cette disposition allait à l'encontre d'une loi fédérale sur la liberté de conscience qui interdirait toute discrimination contre les assureurs qui refusent de couvrir les avortements.
Le ministère de la Santé a annoncé mercredi dans un communiqué que, faute de s'être mises en conformité, les autorités californiennes allaient être privées de 200 millions de dollars, retenus sur le financement fédéral destiné à la couverture santé des plus pauvres au titre du premier trimestre 2021.
"Les entités qui reçoivent des fonds (du ministère de la Santé) devraient y réfléchir à deux fois avant d'enfreindre la loi fédérale", écrit dans un communiqué Roger Severino, directeur du bureau des droits civiques de ce ministère.
"Quoi qu'on pense de la légalité de l'avortement, personne ne devrait être puni pour refuser de payer ou de contribuer pour le retrait d'une vie humaine", affirme-t-il.
Le ministère de la Santé précise que 200 millions de dollars seront retenus chaque trimestre sur les fonds destinés à la Californie tant que la législation n'aura pas été amendée.
Cette décision a toutefois peu de chances d'être suivie d'effets, le président élu, Joe Biden, ayant toute latitude pour l'annuler une fois entré en fonctions.
Ironie de l'histoire, c'est l'actuel procureur général de Californie, Xavier Becerra, que M. Biden a choisi pour devenir son ministre de la Santé.
Selon un sondage du centre de recherches Pew datant de 2018, 58% des Américains estiment que l'avortement devrait être légal mais 37% souhaitent son interdiction.
Quels sont les enjeux pour les droits des femmes en 2020?
OPINION. Le mouvement féministe mondial a réussi à prouver au cours des années qu’il peut surmonter de fortes résistances lorsqu’il s’agit de défendre les droits de groupes marginalisés. En 2020, il y parviendra de nouveau, écrit Françoise Girard, présidente de la Coalition internationale pour la santé des femmes
Que ce soient les démarches des républicains aux Etats-Unis pour que la Cour suprême annule la décision Roe v. Wade, qui, en 1973, a inscrit dans la jurisprudence le droit des femmes à l’avortement, ou bien les nouvelles restrictions imposées par la Pologne à l’accès aux moyens contraceptifs d’urgence, jusqu’au renforcement des restrictions au Brésil de l’éducation sur la santé sexuelle, les temps sont durs pour les femmes. Mais le mouvement féministe mondial a réussi à prouver au cours des années qu’il peut surmonter de fortes résistances lorsqu’il s’agit de défendre les droits de groupes marginalisés. En 2020, il y parviendra de nouveau.
Le défi est de taille. Une conséquence inévitable de l’autoritarisme, du nationalisme ethnique et de la xénophobie saisis ardemment par des dirigeants politiques de bon nombre de pays – en particulier le Brésil, la Hongrie, l’Inde, la Turquie et les Etats-Unis – est la continuation de normes régressives sur l’égalité des différentes identités sexuelles. Selon les dirigeants partisans de la manière forte comme Jair Bolsonaro au Brésil, Viktor Orban en Hongrie et Narendra Modi en Inde, les femmes naissent pour devenir des épouses et des mères; les immigrants et les minorités raciales, religieuses et ethniques sont des éléments dangereux et inférieurs. Pour ces dirigeants, les personnes LGBTQI+ qui se font ostraciser, emprisonner ou même assassiner l’ont bien cherché. Ces dirigeants ont encouragé les gens qui partagent leurs vues à s’engager dans des actes de discrimination et de violence sur des minorités ethniques ou autres, des migrants, des femmes et d’autres groupes marginalisés.
Par des mesures comme les restrictions sur l’avortement et la contraception et l’élimination des protections des personnes LGBTQI+, ces dirigeants cherchent à dicter aux gens ce qu’ils font de leur corps, de leur sexualité et de leur reproduction. Ils pénalisent ceux qui osent défier leurs convictions rétrogrades. Par exemple, dès son entrée à la Maison-Blanche, le président des Etats-Unis, Donald Trump, a rétabli la «règle du bâillon mondial», ayant pour effet de causer la mort de femmes, car elle exclut de l’aide américaine tout organisme international qui gère des cliniques d’avortement, qui y dirige des femmes ou qui se fait le défenseur de ces services. Or, à titre de présidente de la Coalition internationale pour la santé des femmes et porte-parole de longue date du droit des femmes, j’ai été aux premières loges de ce que le mouvement féministe peut accomplir. Songeons à la lutte des féministes en Argentine contre des législations excessivement restrictives en matière d’avortement.
Des progrès partout
Il y a vingt ans, aux Nations unies, les diplomates argentins refusaient même de reconnaître les droits en matière de santé sexuelle et génésique. Mais en 2005, les féministes d’Argentine ont lancé une campagne nationale pour le droit à l’avortement légal, sans risque et gratuit, livrant dès le début un âpre combat contre de puissants adversaires. En 2018, des centaines de milliers de militantes et militants ont envahi les rues partout au pays portant des foulards verts (devenus depuis le symbole mondial de la défense du droit à l’avortement) pour exiger que le Sénat adopte le projet de légalisation de l’avortement. Le mouvement a perdu la bataille, mais par une très faible marge – un résultat qui aurait paru impossible, il y a à peine quelques décennies. Et les militantes ont poursuivi le combat. Le mois dernier, l’Argentine a investi au pouvoir un président, Alberto Fernandez, qui a promis de légaliser l’avortement.
Genève
Comme le mouvement féministe l’a prouvé à maintes reprises, grâce à un engagement soutenu, les changements qui semblaient autrefois impossibles peuvent plus tard paraître inévitables
Il n’est jamais facile de faire évoluer une société pour qu’elle protège les groupes marginalisés. Les gains rapides contre une faible opposition sont rares. Cela étant, comme le mouvement féministe l’a prouvé à maintes reprises, grâce à un engagement soutenu, les changements qui semblaient autrefois impossibles peuvent plus tard paraître inévitables. L’année dernière seulement, nous avons été témoins de nombreux exemples de tels changements. L’Etat d’Oaxaca du Mexique et l’Etat de Nouvelle-Galles du Sud en Australie ont décriminalisé l’avortement, comme l’a fait l’Irlande du Nord, tandis que d’autres Etats ont libéralisé leurs lois, en élargissant les circonstances dans lesquelles les femmes peuvent avoir accès à des services d’avortement légaux et sans risques. En avril, la Cour suprême de Corée du Sud a invalidé les lois du pays en matière d’avortement, les qualifiant d’inconstitutionnelles, préparant le terrain pour une décriminalisation cette année même.
Outre ces questions d’avortement, l’Autriche, l’Equateur, l’Irlande du Nord et Taïwan ont tous légalisé le mariage entre personnes de même sexe en 2019. De plus, dans le cadre d’un changement de garde politique remarquable, la Finlande a élu Sanna Marin, une femme de 34 ans, au poste de première ministre. Des femmes dirigent maintenant les cinq partis politiques composant la coalition gouvernant le pays et quatre d’entre elles ont moins de 40 ans. Les porte-parole des droits des femmes sont déterminé(e)s à faire de 2020 une année au moins aussi importante dans la lutte mondiale pour l’égalité, non seulement des femmes et des jeunes filles, mais de toutes les personnes. Ainsi, en Inde, ce sont les femmes qu’on retrouve à la tête des mouvements de protestation contre la nouvelle loi de citoyenneté jugée discriminatoire envers les musulmans.
Comme le mouvement féministe l’a prouvé à maintes reprises, grâce à un engagement soutenu, les changements qui semblaient autrefois impossibles peuvent plus tard paraître inévitables
Alliance progressiste
Il est particulièrement inspirant de voir de jeunes militantes et des activistes à identité sexuelle multiple à la tête de mouvements prônant des changements en profondeur. Par exemple, Emma Gonzalez réclame une réforme de la loi américaine sur les armes à feu, Bertha Zuñiga défend les droits territoriaux des populations autochtones du Honduras, et Jamie Margolin et Greta Thunberg se révèlent être des têtes de proue du militantisme environnemental. Cette année marque le 25e anniversaire de la Déclaration et du Programme d’action de Beijing des Nations unies, qui inscrit les droits des femmes dans le cadre des droits de la personne et définit l’importance de l’égalité des sexes dans l’échéancier international. Depuis la création de la plateforme, les militants et militantes s’en sont servis pour faire en sorte que les gouvernements respectent leurs engagements sur un vaste éventail de problématiques, dont la mortalité maternelle, le mariage des enfants, la violence sexiste, la participation politique et les droits génésiques. Les militantes féministes poursuivront le travail dans le cadre du Forum Génération égalité Beijing +25, coprésidé par le Mexique et la France, qui se déroulera à Mexico en mai et à Paris en juillet. Elles y réclameront de nouveaux engagements fermes de s’attaquer à des enjeux transversaux comme les changements climatiques et la crise des réfugiés.
Cette perspective élargie est essentielle. En fait, le mouvement féministe doit raffermir ses alliances avec d’autres mouvements progressistes, surtout ceux qui se battent pour la viabilité environnementale, l’équité dans le traitement des minorités ethniques et les droits des LGBTQI+. Ce n’est que par une mobilisation générale et par un soutien mutuel des autres programmes que nous pourrons triompher des forces racistes, hétéronormées, patriarcales et exploitatrices, afin de construire un monde plus juste, plus équitable et plus pérenne. Les effets de ces initiatives seront orientés par les décisions des citoyens et des décideurs politiques. L’élection présidentielle aux Etats-Unis en novembre sera particulièrement importante. Pour le meilleur et pour le pire, les Etats-Unis exercent une influence disproportionnée sur l’efficacité des interventions dans le reste du monde pour régler des problèmes allant des changements climatiques à l’aide étrangère, en passant par la diplomatie et les droits de la personne.
En cas de défaite de Trump, les Etats-Unis pourraient de nouveau servir d’exemple, relançant la coopération multilatérale, renouvelant l’appui aux agences de l’ONU œuvrant en santé et en droits de la personne et assurant que les fonctions supérieures de l’Etat et du système judiciaire sont de nouveau occupées par des personnes compétentes qui viennent en appui aux droits de la personne et à la règle de droit. Mais quoi qu’il arrive, une chose est sûre: le mouvement féministe et ses alliés progressistes ne baisseront pas les bras.
Traduit de l’anglais par Pierre Castegnier.
Françoise Girard est présidente de la Coalition internationale pour la santé des femmes.
Copyright: Project Syndicate, 2020.
www.project-syndicate.org
Une tribune: Restez vigilantes toute votre vie!
Arrivées en Belgique, les victimes d'excision restent en enfer
Publié le - Mis à jour leAucun cas d’excision perpétrée sur le sol belge n’a été recensé actuellement. Cette mutilation génitale féminine (MGF), qui vise à l’ablation partielle ou totale du clitoris et des petites lèvres, est condamnable sur notre sol d’une peine d’emprisonnement de trois à cinq ans à quiconque l’aura pratiquée, facilitée ou favorisée avec ou sans le consentement de la personne concernée.
La Belgique touchée
Pourtant, même si aucun cas de la pratique n’a été répertorié en Belgique, le problème des mutilations sexuelles féminines n’est pas à dénigrer. Selon le rapport "Violences de genre et mémoire traumatique" délivré vendredi par le GAMS (Groupe pour l’abolition des mutilations sexuelles féminines) Belgique et l’ASBL Intact, de nombreuses migrantes originaires des pays qui pratiquent l’excision vivent en Belgique. En 2012, sur le sol belge, vivaient 13 112 femmes excisées et 4 084 qui risquaient de l’être, et 1 300 femmes demandaient l’asile pour ces raisons.
La plupart de ces jeunes filles et de ces femmes qui demandent l’asile en Belgique sont originaires de dix pays d’Afrique : la Guinée, la Somalie, l’Egypte, l’Ethiopie, la Côte-d’Ivoire, le Nigeria, le Sierra-Leone, le Sénégal, le Burkina Faso et Djibouti.
En vue de se conformer à ses engagements sur le plan de la protection des droits fondamentaux, la Belgique est tenue d’accorder une protection internationale à une personne qui risque d’être victime de MGF en cas de retour dans son pays d’origine. Les derniers chiffres en date du commissariat général aux réfugiés et aux apatride (CGRA) informent qu’en 2014, sur les 518 dossiers traités au fond, 355 se sont clôturés par une décision positive de reconnaissances du statut de réfugié.
Encore plus de stress
Ces jeunes femmes sont placées en centres d’accueil à travers le pays. En plus d’être traumatisées et de dépendre de soins psychologiques, le stress lié à leur procédure d’asile et à leur accueil en centre leur rend la vie difficile.
D’abord, parce que leur dossier est évalué sur la base d’une interview au CGRA. "Ces jeunes femmes ont énormément de difficultés à parler de leur expérience. Premièrement, à cause de leur état psychologique, ensuite de leur profil, de la barrière de la langue, mais elles doivent aussi fournir des preuves matérielles comme un certificat médical et psychologique", explique Charlotte Chevalier, juriste au sein de l’ASBL Intact
Ensuite, la vie en centre peut être synonyme de harcèlement moral pour ces femmes. Sarah Strauven et Min Symoens travaillent toutes deux dans le centre pour demandeurs d’asile de Saint-Trond qui accueille 92 femmes sur les 464 résidents. "Elles nous confient l’existence d’agressions d’hommes mais aussi de femmes. Les hommes les attendent à la sortie, dans leur voiture et leur parlent de façon inappropriée, ou entrent dans leur chambre. D’autres filles sont filmées dans la cafétéria lorsqu’elle mangent. Elles restent enfermées dans leur chambre et ne veulent plus en sortir". Après un parcours laborieux pour arriver en Belgique, "elle doivent encore survivre dans le centre".
Quel accès aux soins de santé ?
Si la demandeuse d’asile est accueillie dans un centre de Fedasil , elle peut bénéficier de l’aide matérielle comprenant l’hébergement, les repas, l’habillement, l’allocation journalière ainsi qu’à une aide juridique. Depuis 2007, tout demandeur d’asile a également droit aux soins médicaux couverts par la sécurité sociale. D’autres soins, qui ne le sont pas mais qui relèvent de la vie quotidienne, comme les soins de santé mentale, sont remboursés.Si la réfugiée est placée dans une initiative locale d’accueil, qui dépend du CPAS du lieu dans laquelle elle se trouve, la continuité de ces soins peut être interrompue. En effet, les CPAS ne sont pas remboursés suivant la liste des soins médicaux inscrits dans l’arrêté royal mais le sont en fonction de leur nomenclature. Certains soins médicaux remboursés par Fedasil ne le sont donc pas par les CPAS.
Si la migrante est déboutée , que sa demande d’asile est refusée, elle se trouve donc en séjour irrégulier sur le sol belge. Dans ce cas, elle doit se rendre dans son CPAS, prouver qu’elle est en séjour irrégulier, qu’elle réside dans la commune du CPAS et prouver son état de besoin. Si ces conditions sont remplies, elle pourra bénéficier d’une aide médicale urgente et de certains soins remboursés par la Sécu, comme les consultations psychologiques. Bien sûr, ces preuves sont difficiles à rassembler pour une personne qui a perdu son droit d’accueil et l’accès aux soins de santé, notamment mentale, devient impossible, ce qui provoque l’isolement de la personne.
Le réveil de l'Amérique latine, horrifiée par les meurtres de femmes
Publié le - Mis à jour leLucia, Argentine de 16 ans, Joseline, Mexicaine de 22 ans, Florencia, Chilienne de 10 ans : ces récentes victimes de meurtres sauvages ont fait sortir dans la rue des milliers de femmes en Amérique latine, une région qui se réveille face aux crimes machistes.
Si le cas de Lucia Pérez, droguée, violée et torturée, a choqué l'Argentine, l'appel à manifester le 19 octobre a été suivi au Chili, en Uruguay, en Bolivie et au Mexique notamment, scandalisés par leurs propres drames, comme la mort de Florencia, asphyxiée par son beau-père, ou de Joseline Perralta Aguirre, retrouvée étranglée et couverte de bleus.
Au Pérou, le président Pedro Pablo Kuczynski a participé à une protestation similaire en août réunissant 50.000 personnes. Dans la région, syndicats et partis politiques se sont joints au mouvement.
"Oui, il y a un changement et c'est très important", salue l'Indienne Lakshmi Puri, directrice exécutive adjointe d'ONU Femmes, dans un entretien à l'AFP : "Ce cri de zéro tolérance (face aux violences machistes, ndlr) vient désormais de partout".
Cela lui rappelle son propre pays où le viol collectif et la torture d'une étudiante, fin 2012, avaient déclenché une mobilisation historique. En Amérique latine où règne "la culture du machisme", "c'est la même indignation que provoque actuellement cette violence brutale contre des femmes et des fillettes".
La région offre un sombre panorama : sur les 25 pays au monde enregistrant le plus de meurtres machistes, la moitié sont latino-américains, explique Mme Puri.
L'aide des réseaux sociaux
"C'est terriblement dangereux d'être une femme en Amérique latine", se désole Ariadna Estevez, chercheuse à l'Université nationale autonome de Mexico.
Elle rappelle qu'au Mexique, "la mobilisation contre les meurtres de femmes dure depuis au moins 20 ans, à cause des femmes assassinées à Ciudad Juarez", mais est longtemps restée cantonnée aux proches des victimes.
Désormais dans la région, "il y a un réveil" : en Argentine, "depuis l'an dernier, une campagne a été créée avec le mot-clé #NiUnaMenos" (Pas une de moins) et au Mexique, le printemps violet (#Primaveravioleta) a éclos sur Twitter ou Facebook.
"Les réseaux sociaux ont joué un rôle fondamental", explique Ariadna Estevez, et pas seulement pour mobiliser les foules.
"Cela a servi de catharsis, car beaucoup de femmes n'avaient pas parlé du harcèlement et de la violence qu'elles avaient subis : elles se sont rendues compte que cela concernait pratiquement la majorité des femmes", comme au Brésil avec la campagne #Meuprimeiroassedio (mon premier harcèlement).
En Uruguay, l'assistante sociale Fanny Samuniski reçoit depuis des années, dans l'association Mujer Ahora, des femmes maltraitées.
Elle a noté une évolution : "au début, elles venaient en disant +je suis désespérée, je veux que vous lui parliez...+. Maintenant elles arrivent en demandant +quels sont mes droits ?+".
Dans ce petit pays réputé pour avoir été l'un des premiers de la région à autoriser le divorce et l'avortement, 19 femmes ont été assassinées par leur partenaire ou ex-partenaire depuis début 2016, selon un décompte d'associations.
Nouvelles générations
Un cas, en juin, a horrifié les Uruguayens : à Paysandu (nord), un homme a incendié la maison de son ancienne compagne, la blessant grièvement et tuant ses trois filles et une amie.
Face aux violences conjugales, "les femmes dénoncent beaucoup plus qu'avant mais elles supportent ça dix ans" avant de porter plainte, souvent parce qu'elles n'ont pas les moyens de vivre seules, soupire Fanny Samuniski.
Elle milite pour inclure dans le code pénal uruguayen le concept de "féminicide", comme l'ont déjà fait 16 pays latino-américains pour mieux comptabiliser et sanctionner ce fléau.
A presque 80 ans, elle se réjouit de voir ces mobilisations massives contre la violence machiste : "les femmes de ma génération, nous étions beaucoup plus timides, elles (les nouvelles générations, ndlr) sont plus guerrières".
L'Argentine Maria Nieves Rico, directrice du département des questions de genre à la Commission économique pour l'Amérique latine (Cepal), a participé à la manifestation régionale du 19 octobre, à Santiago du Chili, siège de cet organisme de l'ONU.
"Ce qui m'a frappée, de façon positive, c'est la quantité de jeunes filles", raconte-t-elle, soulignant que celles-ci "naissent et s'éduquent dans un autre contexte" qui leur donne plus d'armes pour réagir.
Il faudra du temps pour changer les mentalités dans la région, mais "on entend leurs voix, et cela aide toujours".http://www.lalibre.be/actu/international/le-reveil-de-l-amerique-latine-horrifiee-par-les-meurtres-de-femmes-581d7d6acd70958a9d5d22ed
C’est ça, ma vie de femme noire chez les blancs - La Libre.be
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Opinions
Mtetwa-Middernacht. D'origine zimbabwéenne, elle est doctorante à la
Brussels School of International Studies de l'Université de Kent et vit
en Belgique.
bienséance codifiant les sociétés dites "éclairées" interdisaient toute
référence à l’appartenance raciale d’une personne. L’on préférait
expliquer les choses, et notamment les différentes façons dont les gens
sont traités, par d’autres facteurs que la race. Ces derniers temps,
toutefois, mon vécu de femme noire évoluant dans une société
majoritairement blanche m’a obligée à remettre en question cette idée,
au point de me dire que l’incapacité de la société européenne à faire
face à la réalité de ses préjugés revient à une forme de déni.
fruit de mon imagination, plus sa réalité revient au galop, m’obligeant
à y revenir, encore et encore, au fil des contrôles aux postes
frontières.
le contraste entre mes expériences dans les deux aéroports est
édifiant. Permettez-moi de m’expliquer et de décrire quelques scénarios
typiques.
Lorsque j’atterris à Bruxelles, j’endure l’interrogatoire de
routine que la police des frontières réserve de façon récurrente aux
non-Européens : à qui venez-vous rendre visite ? Combien de temps
resterez-vous dans le pays ? Quelle est votre adresse exacte pendant
votre séjour ? Pouvez-vous me montrer votre billet retour ? Le
fonctionnaire examinera en détail mon visa pour s’assurer qu’il ne
s’agit pas d’un faux et apposera finalement le cachet sur mon passeport,
sans grande conviction.
Je me dirige ensuite vers le tapis roulant pour récupérer ma
valise. On m’arrête juste avant la sortie, pour inspecter ma valise. Je
regarde autour de moi et remarque que le fonctionnaire qui m’interroge
et examine ma valise est entouré d’autres voyageurs également arrêtés
juste avant la sortie. Ils sont tous soit de race noire, soit,
apparemment, de religion musulmane. A l’évidence, ce sont là les seuls
critères utilisés pour déterminer si une personne est suspecte.
international de Johannesburg ou à l’aéroport de Bulawayo, au Zimbabwe.
Les passagers se dirigent vers leurs files de contrôle passeports
respectives. Les Européens n’ont pas eu besoin de demander un visa à
l’avance, ils le recevront à leur arrivée à l’aéroport. Ils ne subiront
pas d’interrogatoire, et auront même en général droit à un sourire de la
part du fonctionnaire.
passeports non européens au terminal Eurostar de Bruxelles, m’apprêtant à
monter sur le train de Londres. Je voyage avec mon mari mais, lorsque
nous avons commencé à voyager ensemble, nous nous sommes rapidement
rendu compte que sa couleur de peau (blanche) me protégeait de la
déshumanisation des contrôles aux frontières. Nous nous étions dès lors
mis d’accord que, par principe, nous ne passerions jamais le contrôle
passeports ensemble, car accepter ce genre de protection reviendrait à
accepter que certaines personnes ne valent à être reconnues que si elles
sont protégées par la blancheur de la peau (et toutes les identités
culturelles y associées) du "protecteur".
Je commence par subir le long interrogatoire donc l’objectif
est de savoir si je voyage seule, alors que j’ai un visa d’affaires.
Apparemment, ce serait plus facile pour les forces de l’ordre de laisser
passer des hommes et femmes d’affaires non européens voyageant avec des
européens… Le fonctionnaire me demande alors si j’ai été exposée au
virus Ebola. Etrangement, cette question n’est pas posée à aucun
passager blanc. Et pourtant, paradoxalement, toutes les personnes que je
connais qui ont été dans des pays affectés par le virus Ebola sont des
Occidentaux blancs qui travaillent dans le secteur de l’aide au
développement. Je me demande si la stratégie de profilage racial sera
vraiment efficace pour prévenir la propagation du virus Ebola au
Royaume-Uni…
au contrôle des frontières français prend ma carte d’identité et me fixe
du regard, puis fixe à nouveau ma carte d’identité, et ceci à plusieurs
reprises. Il me demande de retirer mon bonnet de laine et de regarder
dans plusieurs directions, tout cela alors qu’il tente de vérifier si la
photo sur ma carte d’identité est vraiment celle de mon visage.
Mon mari, qui se tient derrière moi, grince des dents mais
honore notre accord et n’intervient pas. Lorsque c’est son tour de
passer, il demande : "Est-ce vraiment nécessaire de fixer une personne pendant quatre minutes et une autre pendant à peine trois secondes ?" Le fonctionnaire lui répond : "Je fais juste mon travail ! Certaines personnes sont plus difficilement reconnaissables que d’autres."
Lorsque mon mari me rejoint de l’autre côté du comptoir,
nous restons là quelques instants afin d’observer si les autres
personnes dans la file d’attente, et en particulier celles avec un
bonnet de laine, sont dévisagées de la même manière. Un homme noir est
prié d’enlever son bonnet et se fait examiner pendant plusieurs minutes.
Trois femmes blanches portant un bonnet de laine et certaines portant
des lunettes passent le contrôle frontière en quelques secondes et il
n’est demandé à aucune de retirer leur bonnet ou leurs lunettes.
nombreux incidents similaires que j’ai endurés au cours des dernières
années. Il semble indéniable que, même en 2015, non seulement le
profilage racial persiste mais qu’il soit devenu une norme globale et
acceptable, surtout aux postes-frontières.
Les autorités nous diront que ce profilage est mis en place
pour des raisons de sécurité, mais il continue d’être basé sur, et la
perpétue, la perception que seuls certains groupes représentent une
menace, que cette menace soit envers la sécurité ou la santé publique.
Le privilège lié à la couleur de peau blanche a imposé une
sorte de condition sur la migration et la mobilité. Alors que les
personnes de certaines nationalités sont considérées comme de vrais
citoyens du monde, qui peuvent choisir où elles souhaitent vivre et
voyager sans beaucoup d’entraves, d’autres, y compris celles originaires
de pays qui accueillent à bras ouverts ces mêmes citoyens du monde,
sont considérées comme suspectes uniquement sur base de la couleur de
leur peau.
Les luttes historiques contre la discrimination raciale nous
ont appris qu’il appartient toujours à la victime de poursuivre sa
propre libération. Dans les cas de contrôle frontières, ceci s’avère
évidemment très difficile. Lorsque le discriminateur se tient aux
frontières de son territoire et détermine, même brutalement, les
conditions d’entrée sur le territoire, où allez-vous pour réclamer votre
humanité ?
Il faut s’interroger sur le genre de monde dans lequel nous
vivrions si le monde noir commençait lui aussi à mettre en place des
politiques d’accès à ses territoires aussi discriminatoires.
& Guardian, un hebdomadaire sud-africain. Il fut traduit par
Gwénaëlle Dereymaeker, d’origine belge et vivant à Cape Town, en Afrique
du Sud. Elle a à de nombreuses reprises été témoin de traitements
similaires à ceux exposés par l’auteure de cet article, à savoir des
politiques discriminatoires aux postes-frontières en Europe. Elle n’a
jamais été soumise au même traitement dans n’importe quel port d’entrée
en Afrique.