Quatre élues accusent, à visage découvert, le vice-président de l’Assemblée nationale et député écologiste Denis Baupin d’agressions et de harcèlement sexuels, selon une enquête menée par Mediapart et France Inter . « Il m’a plaquée contre le mur en me tenant par la poitrine et a tenté de m’embrasser, dans le couloir » , affirme par exemple Sandrine Rousseau, porte-parole d’Europe Ecologie-Les Verts (EELV ).
D’autres témoignages font état de harcèlement par SMS ou d’avances
insistantes, dont les plus récents datent de 2014. L’intéressé,
qui dément ces accusations ,
a néanmoins démissionné de son poste de vice-président de l’Assemblée
nationale, à la demande de son président, Claude Bartolone.
« Qu’il soit un dragueur réputé parfois lourd, oui. Je n’ai jamais entendu dire que c’était un agresseur » , a réagi
sur France 3 Barbara Pompili, la secrétaire d’Etat chargée de la biodiversité, qui estime qu’on a
« franchi une limite » . Un commentaire parmi d’autres qui montrent que la frontière entre la
« drague lourde » et un comportement répréhensible n’est pas toujours évidente aux yeux du grand public. Mais que dit la loi ?
Le harcèlement sexuel
De quoi s’agit-il ? La loi du 6 août 2012 relative au harcèlement sexuel
en a précisé les contours et a également aggravé les peines encourues
pour ce délit. Elle en donne deux définitions complémentaires.
La première concerne des actes « répétés » :
« Le harcèlement sexuel est le fait d’imposer à une personne, de façon répétée, des
propos ou comportements à connotation sexuelle qui soit portent
atteinte à sa dignité en raison de leur caractère dégradant ou
humiliant, soit créent à son encontre une situation intimidante, hostile
ou offensante. »
La deuxième concerne des actes « non répétés » :
« Est assimilé au harcèlement sexuel le
fait, même non répété, d’user de toute forme de pression grave dans le
but réel ou apparent d’obtenir un acte de nature sexuelle, que celui-ci
soit recherché au profit de l’auteur des faits ou au profit d’un
tiers. »
Comme l’explique le site gouvernemental
stop-harcelement-sexuel.gouv.fr , la qualification de « harcèlement sexuel » n’est pas seulement liée à la recherche d’un acte sexuel :
« Des propos ou comportements répétés à connotation sexuelle portant
atteinte à la dignité de la victime ou créant pour elle une situation
intimidante, hostile ou offensante peuvent suffire. »
Le délai de prescription est de trois ans à compter des faits les plus récents.
Quelques exemples de faits pouvant relever du harcèlement sexuel :
Une personne qui impose à plusieurs reprises des propos ou des gestes sexistes ou obscènes .
Quelqu’un qui importune régulièrement un(e) collègue avec des messages à connotation sexuelle, malgré sa demande d’arrêter.
Un propriétaire qui exige une relation sexuelle en échange de son logement.
Un cadre qui menace un(e) employé(e) de ne pas obtenir de promotion car il ou elle a refusé ses avances.
Un
environnement de travail dans lequel on trouve des images obscènes et
où des propos sexistes et insultants sont régulièrement tenus, même s’ils ne visent pas directement la victime (on parle alors de harcèlement « environnemental »).
Quelles sont les peines encourues ? Le harcèlement sexuel peut être puni par deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.
Les peines peuvent être portées à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende en présence d’une ou plusieurs situations de
circonstances aggravantes , comme lorsque le harcèlement est commis par quelqu’un qui
« abuse de l’autorité que lui confèrent ses fonctions » .
Combien de cas ? Une femme sur cinq environ se dit victime de harcèlement sexuel dans sa vie professionnelle, selon
une étude de l’IFOP pour le défenseur des droits en 2014 . Mais seuls 5 % des cas sont portés devant la justice.
L’agression sexuelle
De quoi s’agit-il ? L’agression sexuelle est un délit puni par
les articles 222-27 à 222-30 du code pénal , qui dit ceci :
« Constitue une agression sexuelle toute atteinte sexuelle commise avec violence, contrainte, menace ou surprise. »
La loi distingue le viol (lorsqu’il y a pénétration, de quelque type
que ce soit), qui est un crime, des autres agressions sexuelles
(lorsqu’il n’y a pas de pénétration).
La victime doit déposer plainte dans un délai de trois ans après les
faits (jusqu’à vingt ans après sa majorité dans le cas d’un mineur).
Peuvent relever de l’agression sexuelle, par exemple,
des caresses non consenties sur la poitrine ou sur les fesses, des
baisers forcés ou des attouchements sexuels. Dans tous les cas, lors des
poursuites, l’absence de consentement de la victime doit être
démontrée.
Quelles sont les peines encourues ? Les agressions sexuelles autres que le viol sont punies de cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende.
La peine maximale encourue peut passer à sept ans de prison et 100 000 euros en présence de
circonstances aggravantes ,
comme la présence de blessures, l’utilisation ou la menace d’une arme,
ou lorsque l’auteur des faits est un ascendant ou un supérieur
hiérarchique de la victime.
Si la victime est un mineur de 15 ans ou une personne vulnérable, la peine
peut être relevée jusqu’à
dix ans de prison et 150 000 euros d’amende .
Combien de cas chaque année ? Environ 20,4 % des
femmes et 6,8 % des hommes de 18 ans à 69 ans ont subi des violences
sexuelles (attouchements, tentatives de rapport forcé ou rapports
forcés) au cours de leur vie, selon une étude de l’Institut national de
la santé et de la recherche médicale (Inserm) et de l’Institut national
d’études démographiques (INED) en 2006.
Le viol
De quoi s’agit-il ? Le viol est un crime définit par
les articles 222-23 à 222-26 du code pénal comme :
« Tout acte de pénétration sexuelle, de
quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence,
contrainte, menace ou surprise. »
Tous les actes de pénétration sexuelle sont visés, qu’elle soit buccale, vaginale, anale, par le sexe, par le doigt ou un objet.
La tentative de viol entre également dans ce cadre. Selon
le code pénal , la personne qui
« tente de commettre un crime » est considérée comme auteur de l’infraction. La tentative de viol est constituée
« dès lors que, manifestée par un commencement d’exécution, elle n’a été suspendue ou n’a manqué son effet qu’en raison de circonstances indépendantes de la volonté de son auteur » .
Le délai de prescription dans le cadre d’un viol est de dix ans, et
jusqu’à vingt ans après la majorité pour une victime mineure au moment
des faits.
Quelques exemples de faits qui peuvent relever du viol :
un acte de pénétration sexuelle sans consentement, y compris en l’absence de violences physiques ;
un acte sexuel avec une personne inconsciente au moment des faits ;
un acte sexuel par surprise ;
une fellation forcée.
Quelles sont les peines encourues ? Le viol est puni de quinze ans d’emprisonnement, et jusqu’à vingt ans en cas de
circonstances aggravantes , comme lorsque les faits sont commis par le conjoint de la victime, sur un mineur de 15 ans ou sur une personne vulnérable.
Combien de cas chaque année ? Le ministère de la justice
dénombre 1 075 condamnations pour viol en 2014. Un chiffre à rapporter à
l’estimation selon laquelle 84 000 femmes seraient victimes de viol ou
tentative de viol chaque année en France,
selon
l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee)
et l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales
(ONDRP). Seulement 10 % des victimes porteraient plainte. Dans 83 % des cas, a victime connaîtrait son agresseur, toujours
selon l’Insee et l’ONDRP .
http://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2016/05/09/harcelement-agression-viol-comment-la-loi-definit-les-violences-sexuelles_4916179_4355770.html#4jDZMcchIQsfZ1Yu.99
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